Chiara Fumai, Poems I will Never Release, 2007–2017 (rétrospective)

Redé­cou­vrir Chiara Fumai

Refu­sant de jouer le rôle de vic­time et de se lais­ser enfer­mer dans le sta­tut d’artiste femme, Chiara Fumai (1978 — 2017) a pra­ti­qué l’ironie au sein d’une “fic­tion véri­table” for­gée sur des remix et des réap­pro­pria­tion en ses per­for­mances qui évoquent des figures fémi­nines en colère qui mar­quèrent l’histoire humaine dont elles furent néan­moins les oubliées…

Il y à là et entre autres la femme à barbe Annie Jones, attrac­tion de Bar­num, “la beauté cir­cas­sienne” Zalumma Agra, elle aussi offerte aux regards dans le même cirque, la ter­ro­riste alle­mande Ulrike Mein­hof, la médium anal­pha­bète Eusa­pia Pal­la­dino ou encore la phi­lo­sophe Rosa Luxem­bourg. Mais sur­gissent aussi des magi­ciens mas­cu­lins : Harry Hou­dini ou Nico Fumai, le  per­son­nage de fic­tion inventé par Chiara.

Le Centre d’Art Contem­po­rain Genève pro­pose la pre­mière rétros­pec­tive consa­crée à l’œuvre de l’artiste. Elle a for­te­ment contri­bué à déve­lop­per les lan­gages de la per­for­mance et de l’esthétique fémi­niste du XXIe siècle.
L’exposition scé­na­rise une sélec­tion impor­tante de tra­vaux, même si les per­for­mances sont a priori insai­sis­sables (puisque Chiara Fiu­mai refusa de les docu­men­ter) mais rendent l’artiste unique.

Avec “I Did Not Say or Mean “War­ning” “, elle tra­duit l’esprit d’une femme ano­nyme gui­dant le public à tra­vers la col­lec­tion d’art his­to­rique de la Fon­da­tion Que­rini Stam­pa­lia à Venise. Dans “Chiara Fumai reads Vale­rie Sola­nas” , elle pro­pose une pro­pa­gande fic­tive de Sil­vio Ber­lus­coni.
“The Book of Evil Spi­rits” offre une séance de spi­ri­tisme de la médium Eusa­pia Pal­la­dino qui témoigne de l’intérêt porté par la créa­trice pour les expé­riences médium­niques et la magie noire.

Le titre de l’exposition s’inspire d’une sculp­ture inache­vée – celle du der­nier auto­por­trait de l’artiste, sous la forme d’une marion­nette por­tant un t-shirt sur lequel est écrit “Poems I Will Never Release”. Cette phrase mélan­co­lique évoque ce que l’artiste aurait pu faire si elle n’était pas morte pré­ma­tu­ré­ment.
Elle rap­pelle aussi que Chiara Fumai se fon­dait son tra­vail sur l’interprétation de mots écrits par d’autres, n’ayant elle-même jamais com­posé ses propres poèmes. Elle a pré­féré ras­sem­bler les paroles de femmes qui récla­maient ven­geance et cher­chaient à obte­nir une recon­nais­sance méritée.

jean-paul gavard-perret

Chiara Fumai, Poems I will Never Release, 2007–2017, Centre d’art Contem­po­rain, Genève du 4 novembre 2020 au 31 jan­vier 2021.

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