Un roman aux multiples facettes…
L’univers des pierres précieuses et des joyaux sert de cadre au nouveau roman de Cécile Cabanac.
Son héroïne a quitté l’Auvergne pour Versailles après quelques affectations diverses qui lui ont permis d’accéder au grade de commandant.
Marchand et Fèvre, de la police municipale, effectuent leur ronde dans un Versailles obscurci par une panne d’électricité et un épais brouillard. La voiture avance au pas quand ils heurtent quelque chose. Ils voient une femme étendue sur le flan, vêtue d’une simple chemise de nuit, les pieds nus.
Virginie Sevran est en planque avec son équipe pour arrêter un violeur. En rentrant, son supérieur lui confie une nouvelle mission alors qu’elle aurait voulu boucler celle sur laquelle elle travaillait depuis plusieurs semaines. Mais, il lui faut résoudre le meurtre d’un homme poignardé dans son lit. Elle se console en pensant retrouver Pierre Biolet, avec qui elle a travaillé et qui est affecté dans son équipe. Sur place, dans une pièce surchauffée, elle trouve la scène de crime bien abimée. Les pompiers sont intervenus pensant pouvoir le ranimer. Il s’agit d’un bijoutier de bonne réputation qui tient boutique rue du Faubourg-Saint-Honoré. Il a divorcé pour épouser Mathilde, une jeune femme, il y a deux ans.
Les secours ont emmené la femme accidentée. Celle-ci est très perturbée sous un choc émotionnel. Marchand, se sentant responsable, se rend à son chevet.
Les premiers éléments de l’enquête sont troublants. L’heure du décès pose problème, des différences notables entre celle du médecin légiste et celle donnée par les pompiers.
Peu à peu, les enquêteurs relèvent des incohérences. Et Mathilde, avec l’aide de Marchand, s’enfuit de l’hôpital bien que récemment opérée…
C’est en décrivant cinq parcours principaux que la romancière déroule son intrigue. On retrouve Virginie Sevran à la tête d’une équipe à la DRPJ de Versailles. Elle va devoir faire preuve, avec Pierre Biolet, de tout son talent d’enquêtrice pour trouver la vérité dans cet imbroglio qui mêle d’honorables bijoutiers trafiquant gaiement à des courtiers moins honorables.
À cela s’ajoute des vols de pierres précieuses, des trafics sur des pierres retaillées, des échanges de joyaux sur des parures et des sommes importantes qui disparaissent dans le jeu, des sommes venues des pays de l’Est où la barbarie est de mise…
Cécile Cabanac invite ses lecteurs à suivre les pas d’une théorie de protagonistes peu recommandables. Et il y a pléthore en la matière ! Entre Victor Bardier, le bijoutier assassiné, son ex-épouse Anna Duplaissis, Mathilde Bardier la nouvelle épouse au passé aussi mystérieux que noir, Elena Pletchkova qui a eu son heure de gloire comme conseillère dans des tractations, son adjoint-homme de main, tueur à l’occasion.
S’ajoutent un détective privé-maître-chanteur, un lieutenant au caractère emporté qui n’en peut plus de voir des criminels qu’il faudrait chouchouter alors que l’un d’eux, par exemple, est responsable de nombreux viols dont deux sur mineures. Seul Jacques Marchand, ce brigadier de la police municipale versaillaise fait preuve d’humanité, une humanité qui va l’entraîner, cependant, sur des chemins douteux, douloureux et problématiques.
Cécile Cabanac s’attache à approfondir le caractère de ses personnages et à détailler leurs comportements et motivations. La plupart de ces dernières, d’ailleurs, relèvent de l’appât du gain par tous les moyens. Elle place ses protagonistes en situation, montre l’implication des enquêteurs et fait preuve d’humour quand elle fait demander par l’institutrice de Manon, la fille de Virginie, de faire un gâteau pour une manifestation à l’école.
Elle décrit la frustration, l’amertume des policiers face à la certitude de la culpabilité d’individus sans pouvoir apporter une preuve indiscutable de leur implication dans le crime parce qu’un cabinet d’avocats use de toutes les arguties autorisées par un droit pénal si complexe.
Un roman sombre, presqu’à désespérer de l’Humanité avec une magnifique galerie de personnages bien campés, même les plus noirs, et une héroïne si attachante dans sa pugnacité.
serge perraud
Cécile Cabanac, Requiem pour un diamant, fleuve noir, coll. “Roman policier & thriller”, Septembre 2020, 468 p. – 19,90 €.