Chronique d’une famille italienne d’aujourd’hui !
Maria aurait voulu écrire un livre de recettes. Mais, elle n’a pas eu le temps d’exploiter ses fiches. Elle se réjouit, cependant, de voir ses cinq enfants réunis, sans disputes ni reproches. Ils sont à son enterrement !
Elle présente ses deux filles et ses trois garçons qu’elle a élevé seule depuis que Pietro, son époux, les a quittés il y a plus de vingt ans. Elle pense leur avoir transmis l’essentiel, l’importance de la famille et son atout principal : sa cuisine ainsi que le secret de ses plats avec son basilic.
Elle se souvient quand, en 1969, après sa rencontre avec Pietro, elle a quitté le couvent voulant fonder une belle famille. Elle entreprend de raconter une vie qui fut toute dévouée à ses enfants, de relater qui ils sont, ce qu’ils sont devenus et les tourments qu’ils peuvent vivre.
Giovanni, l’aîné, qui est si gentil qu’il passe pour un idiot, Agata qui se prend pour une artiste, Diego Maria qui est homosexuel et vit aux crochets de riches amants, Rosalia, la plus belle, la préférée et Santo, le petit dernier si longtemps désiré.
Mais, sous cette apparence n’y a-t-il pas des failles ? Autour du cercueil, les souvenirs remontent à la surface, les secrets aussi, des secrets que Maria aurait aimé emporter dans sa tombe…
Avec Basilicò, Giulio Macaione donne un récit singulier teinté d’un humour noir des plus réussis. Autour de cette femme, cette mère qui a dû élever, seule, ses enfants, l’auteur développe nombre de situations de la vie quotidienne, dans les rapports entre les êtres, dans les contacts entre les membres d’un couple, dans les liens qui gèrent une fratrie et les rapports de celle-ci avec le pivot central, en l’occurrence, la mère. Et le scénariste ne mâche pas ses mots pour mettre en scène des sentiments, des émotions, et des éclats.
Avec sept personnages principaux, il illustre nombre de situations, il décrit les principales causes de conflits pouvant survenir entre des êtres humains plus ou moins proches dans une cellule familiale. Peu à peu, se développe une intrigue qui se révèle à la fois subtile, étonnante et parfaitement maîtrisée.
Parallèlement à l’étude des caractères, au récit des tranches de vie et des conflits, il parle de cuisine, donne des recettes intégrant un basilic de haute qualité. Il se moque des arguties religieuses, mais montre le poids de l’Église catholique, son impact sur la vie de nombre de personnes.
Le graphisme réaliste, en noir, blanc et sépia, pour les scènes du passé, est précis. Le trait est élégant, privilégiant une belle galerie de portraits. Les décors sont soignés, présents sans écraser la tension qui sourd des vignettes.
Un album qui se démarque des grandes aventures, concentrant le projecteur sur une existence familiale assez classique, presque ordinaire, tout en tissant une intrigue noire qui se sublime dans un final épatant.
lire un extrait
serge perraud
Giulio Macaione (scénario, dessin, couleurs), Basilicò (Basilicò), traduit de l’italien par Federica Mancuso, Ankama, juillet 2020, 160 p. – 14,90 €.