Marcos Carrasquer ne cesse de créer des tension entre imaginaire et réel, le passé et le présent voire le futur dans ses peintures qui rappellent — entre autres mais pas seulement — des grandes oeuvres qui l’inspirent comme des images du temps.
Celui qui ne dit pas connaître la vie, de fait l’appréhende trop bien : c’est pourquoi il s’en distingue dans ses dystopies où éros et thanatos ne cessent de s’affronter.
Entretien :
Qu’est-ce qui vous fait lever le matin ?
Les nerfs.
Que sont devenus vos rêves d’enfant ?
Des tableaux, j’espère.
A quoi avez-vous renoncé ?
À la lâcheté, mais elle est coriace, la tique.
D’où venez-vous ?
Longtemps j’ai détesté d’où je venais et je voulais le falsifier, ce qui n’est pas mal comme motif pour un peintre.
Qu’avez-vous reçu en dot ?
Le déracinement.
Un petit plaisir — quotidien ou non ?
La tombée de la nuit sur une plage ; pas du tout quotidien.
Qu’est-ce qui vous distingue des autres artistes ?
Je ne sais pas, mais quand je vois le travail des autres qui m’intéressent, je suis conscient que personnellement je n’aborde qu’une infime partie des réalités qui attendent d’être peintes. Pareil pour eux ou elles, j’imagine.
Comment définiriez-vous votre approche du sexe ?
Je pense que c’est la chose la plus puissante qui existe.
Quelle est la première image qui vous interpella ?
Une très, très vielle femme vêtue de noir qui me regardait de sa fenêtre dans une village médiéval dans les Pyrénées catalans et qui semblait me jeter un sort.
Et votre première lecture ?
Un roman en hollandais : de AFC’ers. C’est sur des jeunes footballeurs, beaucoup de mélodrame, un but victorieux dans la dernière seconde et une fille ; Kitty. Je voulais être footballeur professionnel.
Quelles musiques écoutez-vous ?
Robert Johnson, Bob Dylan, The Beatles Jonathan Richman.
Quel est le livre que vous aimez relire ?
J’ai relu Moby Dick, On the road, the conspiracy of dunces et quelques autres mais en fait je n’aime pas relire. Ça m’attriste un peu.
Quel film vous fait pleurer ?
Ok, Brassed off.
Quand vous vous regardez dans un miroir qui voyez-vous ?
Mon reflet bien sûr.
A qui n’avez-vous jamais osé écrire ?
Personne.
Quel(le) ville ou lieu a pour vous valeur de mythe ?
Stalingrad et le Mississippi Delta.
Quels sont les artistes et écrivains dont vous vous sentez le plus proche ?
Je ne vais qu’en nommer deux, le peintre Philip Guston et l’écrivain Philip Roth. Ils étaient très copains et à une époque voisins à Woodstock dans l’état de New York. J’aurais bien aimé avoir bu quelques verres avec eux.
Woodstock, aussi une ville mythique pour revenir à la question précédente. The Band y enregistre The Big Pink et en accompagnant Dylan, the Basement tapes.
Qu’aimeriez-vous recevoir pour votre anniversaire ?
Franchement, de la peinture à l’huile et des bons pinceaux.
Que défendez-vous ?
La grève générale.
Que vous inspire la phrase de Lacan : “L’Amour c’est donner quelque chose qu’on n’a pas à quelqu’un qui n’en veut pas”?
À mon avis, il se trompe, mais je connais pas sa vie.
Que pensez-vous de celle de W. Allen : “La réponse est oui mais quelle était la question ?“
Elle est drôle.
Quelle question ai-je oublié de vous poser ?
Non. c’est bien comme ça.
Entretien et présentation réalisés par jean-paul gavard-perret pour lelitteraire.com, le 19 juillet 2020.