Colette Beaune, Jeanne d’Arc, vérités et légendes

Clari­fier la légende

S’il est un livre qui n’est pas écrit avec de l’eau tiède, c’est bien celui que nous pro­pose Colette Beaune, spé­cia­liste recon­nue de Jeanne d’Arc, jus­te­ment sur ce per­son­nage qui mérite de figu­rer dans la belle col­lec­tion des édi­tions Per­rin, « Véri­tés et légendes ».
On ne compte plus en effet les mythes, men­songes, contre-vérités, mani­pu­la­tions qui ont jalonné, dès son époque, la vie et l’épopée de celle qui mena Charles VII à Reims.

Dans une intro­duc­tion brillante, l’auteur replace Jeanne dans sa place incon­for­table, entre his­toire et mythes, règle ses comptes avec les mytho­graphes, les médias et autres réa­li­sa­teurs. Non, pour com­prendre Jeanne, il faut une his­to­rienne comme elle, dont le métier est d’étudier scien­ti­fi­que­ment les sources.
Dès lors, tout passe au tamis : les ori­gines sociales de Jeanne, ses com­pé­tences guer­rières, la réa­lité de son com­man­de­ment, les enjeux poli­tiques de son épo­pée, le sou­tien du clan ces Arma­gnacs, son pro­cès et sa fin décrite avec les détails suf­fi­sants pour tordre le cou aux thèses survivalistes.

Ce qui fait la force de ce livre, c’est la maî­trise plus que solide de Colette Beaune de la société du XVe siècle. Ainsi nous permet-elle de com­prendre les réac­tions de Jeanne et des hommes de son temps, en nous empê­chant de le lire les évé­ne­ments avec nos yeux du XXIe siècle.
Dès lors, ce qui peut appa­raître curieux, de nature à ali­men­ter les légendes, devient d’une clarté absolue.

Se pose bien sûr la ques­tion reli­gieuse, impos­sible d’évacuer d’un revers de main. Com­ment l’historien doit-il l’aborder ? Sur ce point, Colette Beaune reste pru­dente. Lisons-la : « Et ce que sont les voix est des­tiné à gar­der sa part de mys­tère. Cela n’a en effet aucune impor­tance. Car ce qui compte, c’est que Jeanne et ses contem­po­rains, y ont cru. Les voix sont un fait his­to­rique incon­tes­table. Qu’elles aient existé ou non, elles ont fonc­tionné comme du vrai. »

C’est vrai. Pour­tant, Jeanne d’Arc ne peut pas être dis­so­ciée du monde de la foi. D’abord parce que la ques­tion, à l’époque, ne se pose même pas. Ensuite parce que ce qui s’est passé au XVe siècle résonne encore à nos oreilles.
Dieu décide de sau­ver la France et Jeanne est vic­time de l’élite et de l’Eglise de son temps.

fre­de­ric le moal

Colette Beaune, Jeanne d’Arc, véri­tés et légendes, Tempus-Perrin, 2020, 253 p. — 8.50 €

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