Mathieu Nuss crée ici son lexique ou son pense-pas-bête rehaussé par les superbes dessins de Scanreigh.
Un tel propos possède ses propres limites même s’il a de quoi séduire.
Ce qui fait son charme et certains diront sa pauvreté est que, sous prétexte que nous pouvons créer notre lexique “avec des mots que chacun peut détourner de leur sens commun pour leur faire exprimer son idiosyncrasie avec des citations qu’il aurait choisies”, un tel livre ne peut donner que ce qu’il a : à savoir un florilège de phrases d’auteurs certes habilement choisis.
C’est néanmoins là où le bat blesse. Certes, le lecteur parcourt le livre pour savourer de belles dentelles lourdes de pensées (même lorsqu’elles paraissent nonsensiques).
Mais l’auteur lui-même se contente d’un minimum vital comme s’il ne faisait pas suffisamment confiance.
Pour “l’entendre” trop souvent, seuls les termes génériques qu’il retient sont des indicateurs. C’est un peu juste. Même si avec ça et là quelques phrases impertinentes et judicieuses.
Cela fait regretter que Nuss ne soit pas plus disert. Son humour parfois s’affiche sous forme de soufflet aporétique et bien vu. Pour preuve et comme exemple : “Debussy a écrit une partie de “La mer” en Bourgogne”.
Répétons-le, un tel texte se lit avec plaisir. Il peut même se savourer mais il n’offre que ce que son économie (à tous les sens du terme) réserve.
Le lecteur voudrait beaucoup plus que les belles amorces que Nuss lui tend.
jean-paul gavard-perret
Mathieu Nuss, Avec ceci (lexique), dessins de Scanreigh, Julien Nègre éditeur, coll. partition, Paris, 2020, 24 p. — 15,00 €.