Ce film méconnu de 1966 a un générique des plus alléchants : Romy Schneider et Michel Piccoli dans les rôles principaux, Marguerite Duras signant les dialogues.
Malheureusement, La Voleuse ne tient pas ses promesses, sauf pour ce qui concerne le jeu de Schneider, remarquable de bout en bout, dans un registre sombre qui était inédit pour l’actrice à cette époque-là.
Les défauts du film relèvent, d’une part, du scénario mal construit (la première partie est trop longue et monotone ; l’action s’accélère trop brusquement par la suite) et qui comporte des défauts ahurissants : est-ce possible, dans une histoire d’enfant “volé“ à ses parents nourriciers par sa mère biologique, de traiter le personnage du petit garçon à peu près comme s’il s’agissait d’une poupée ?
De fait, son “rôle“ n’en est pas un, l’enfant restant muet pendant le peu de temps où il est présent à l’écran. D’autre part, la mise en scène est tantôt maladroite, tantôt calquée sur les procédés typiques d’Antonioni (cf. Le Cri, La Nuit, Le Désert rouge), qu’il s’agisse de filmer la ville, l’usine ou les personnages en intérieurs.
En outre, on subodore que Jean Chapot ne savait guère s’y prendre en matière de direction d’acteurs, car Michel Piccoli, d’ordinaire excellent, est ici terne et peu convaincant. Le film présente un autre défaut, qui était sans doute moins frappant à l’époque de sa sortie que de nos jours : un esprit misogyne particulièrement curieux dans un contexte où il est question de maternité.
La mère biologique est présentée comme une égoïste féroce ; la mère adoptive n’est guère plus qu’une figurante. En revanche, leurs deux époux sont exemplaires, chacun à sa façon, l’un par l’amour qu’il porte à son fils adoptif, l’autre par le souci du bien de l’enfant et de sa famille d’adoption, souci qu’il garde même aux moments où il prend le parti de sa femme.
Enfin, les dialogues de Marguerite Duras lui ressemblent si peu qu’on se demande si elle a réellement rédigé plus que quelques répliques de l’ensemble des propos qu’on entend dans le film.
La plupart de ceux-ci sont élémentaires et univoques au point qu’on est tenté de les classer dans le “degré zéro de l’écriture“.
Le film est accompagné d’un bonus agréable et instructif, surtout pour ce qui concerne Romy Schneider.
Comme ce documentaire, La Voleuse est à recommander exclusivement aux admirateurs de l’actrice.
agathe de lastyns
La Voleuse
de : Jean Chapot
Avec : Romy Schneider, Michel Piccoli, Hans Christian Blech
DVD, éd. Doriane Films, juin 2020,
durée totale 114 minutes. – 13,99 €