Délicieuses digressions intempestives
Patrick Boutin ici veut renverser le jeu en devenant l’illustrateur des dessins de Simon Deshusses.
Sans partager l’admiration sans réserve que le poète lui porte, il est certain que Deshusses a plus qu’un talent pour décliner le monde tel qu’il est — surtout dans sa misère et ses méfaits.
Ce qui n’enlève rien à son don et surtout à son ironie pour croquer divas et strip-teaseuses et autres sumos ou exhibitionniste guère reluisants.
Boutin s’en amuse et ajoute sa propre caricature aux croquis. C’est une subtile analyse iconique.
Mais l’auteur ne s’arrête pas en si bon chemin. Chaque dessin devient l’occasion de délicieuses digressions intempestives.
A une passante (hors champ) que croise un clochard, Boutin ajoute “brassière ou soutien-gorge à balconnets”. Certes, selon le poète, de tels dessous chics auraient moins pour objectif d’affrioler le pauvre errant que de lui servir de fronde.
Mais la triste réalité prend soudain un air de fête.
Et tout est à l’avenant. Les soutifs ne sont qu’un exemple.
Chaque dessin même lorsqu’il est dur et violent permet au chenapan de broder ses époustouflantes historiettes.
jean-paul gavard-perret
Patrick Boutin, L’âme à Deshusses, Editions Gros textes, Fontfourane, 2020, 68p. — 10,00 €.