Quand les retrouvailles ne sont pas…
Marie et Raphaël se sont fait la promesse, le soir de leur vingt ans, de se retrouver à quarante ans pour une nuit à Rome.
En ce début de matinée du quinze août, Alessandro retrouve Ornella pour un délicieux moment intime. Un appel met fin à la rencontre et déclenche l’ire de la bellissima. C’est Marie qui, ne connaissant personne à Rome, l’appelle. Elle est à l’aéroport, bloquée par une grève. Il lui faut absolument repartir car sa mère est morte.
Raphaël a laissé ses potes qui dorment encore pour se rendre à l’hôtel où il avait, il y a dix ans, retrouvé Marie. Elle a quitté les lieux. Il tente sa chance et va à l’aéroport où il finit par la retrouver, malgré la foule. Celle-ci refuse d’expliquer son geste et rejoint Alessandro qui vient d’arriver.
Raphaël s’invite dans la voiture prétextant que son avion est bloqué au sol par la grève et que, s’ils vont au centre de Rome, cela le dépannerait vraiment et… entre Français…
Commence alors une suite de refus, d’acceptations, de rejets, d’accords, de récusations entre Marie et Raphaël jusqu’à…
Les retrouvailles n’ont pas souvent la magie espérée. Ces moments ne sont presque jamais comme imaginés. Raphaël est venu avec une bande de copains. Marie est arrivée seule. Les héros abordent la cinquantaine.
Si Jim donne à Marie quelques rides qui accroissent, en fait, son pouvoir de séduction, il lui conserve une silhouette toujours aussi élégante. Mais, il n’est pas aussi délicat avec Raphaël qui accuse son âge au point, d’ailleurs d’avoir de gros soucis de santé.
L’auteur met en scène nombre de situations relatives au deuil, ce drame qui frappe au plus profond de la personnalité et qu’il faut surmonter. Il décrit avec une remarquable empathie, une réelle justesse, le désarroi de Marie face à la disparition de sa mère.
Il revient sur les regrets éprouvés, quand des proches disparaissent, pour ne pas avoir été aussi présent vers eux, pour ne pas leur avoir témoigné l’amour que l’on a pour eux, la présence et le soutien que l’on peut apporter face à la vieillesse et au déclin qui l’accompagne.
Jim exprime aussi les interrogations qui traversent chacun à une époque de sa vie, sur les chemins empruntés, sur leur choix et leur pertinence, sur les objectifs poursuivis, sur la situation tant matérielle que sentimentale. C’est le moment d’un bilan plus ou moins glorieux.
Il place son héros dans l’incertitude, dans l’expectative quant à sa vie, quant à ses sentiments vis-à-vis de Marie.
Le scénariste installe un climat nostalgique dans ce volume, avec ces appréhensions face au temps qui passe et qui inexorablement ramène aux actes manqués.
Il livre partant nombre de réflexions dans cet album, un album riche émotionnellement et qui clôt somptueusement sa tétralogie.
Outre le scénario, Jim assure le dessin. Il est aidé par Delphine pour la mise en couleurs. S’il donne quelques vues superbes de Rome et de ses monuments emblématiques, et de Sète, il s’attache surtout à ses personnages, mettant en valeur leur expressions, les non-dits de leur gestuelle et les effets de leurs émotions.
Ce Livre 4 achève de manière élégante la série, une série attachante qui conte l’histoire d’une femme et d’un homme face à la vie, cette vie qui… complique tout!
lire notre entretien avec Ulysse Terrasson
serge perraud
Jim (scénario, dessins et couleurs), Delphine (couleurs), Une nuit à Rome — Livre 4, Éditions Bamboo, coll. “Grand Angle”, juin 2020, 120 p. – 18,90 €.