Le livre de Preschez est brûlant de vie (et d’actualité du moment) par effet de retour suite au plus grand des voyages : celui qui a porté son auteur — après un AVC et une “mort clinique” — sur des chemins où la mémoire vive peu à peu reprend place dans la suite de son La trille du diable (Tinbad, 2018).
Celui qui est poète, écrivain mais aussi musicien livre ici en fragments ce qui remonte peu à peu mais aussi les choses vues qui, parfois, se mélangent (très astucieusement) chez celui dont peut se résumer le livre par un de ses aphorismes ” :“La vie par la vie, avec la vie, transmet en la vie ta vie”.
Elle est plus forte que tout pour celui qui en a connu les bords et qui retrace ici en une “lettre volée” ce qu’il nomme “l’éphéméride de nos années perdues”. Parlando (comme l’indique le titre), elles revivent en divers déplacements là où, sous le “je”, se manifeste le “ça” freudien si bien qu’une nouvelle grille de lecture voit le jour dans les fractures du livre.
La pensée devient plus profonde car, par le transfert de conscience que la maladie a induit, des déblocages voient le jour. “Ce qui reste du sens” n’est pas un moindre rébus. Il “naît d’une foi inventée” qui est plus forte que les transcendances car se crée un désir particulier par le réévaluation de ce qui est loin des emprises qui s’effacent en une telle “épreuve”.
Les seules qui demeurent sont celles de Brahms, Ravel, Boulez ou des “ardoises” de Daoul Ubac. Elles affleurent partout : au bar du coin comme devant le lac Léman.
Bien des clusters du vivant s’y retrouvent non confinés mais génèrent désormais ce qui avance au moment où le livre rappelle ce que nous venons à votre tour de traverser collectivement.
jean-paul gavard-perret
Dominique Preschez, Parlando, Z4 Editions, coll. La diagonale de l’écrivain, 2020, 142 p. — 12,00 €.