Noga Albalach, Le Vieil homme. Des adieux

Que reste-t-il d’un père ?

A 90 ans, Shlomo souffre d’une mala­die dont on devine que c’est celles d’Alzheimer. Sa fille unique fait de son mieux pour res­ter proche de lui à tra­vers cette épreuve.
Dans ce récit, rédigé à la troi­sième per­sonne du sin­gu­lier, mais indu­bi­ta­ble­ment auto­bio­gra­phique, l’auteure recueille ce qui reste du vieil homme – qui se sou­vient d’avoir été ouvrier en bâti­ment dans sa jeu­nesse, mais pas du métier d’avocat qu’il a pour­tant exercé un demi-siècle durant – et ce qu’on en découvre à la faveur de la mala­die, notam­ment qu’il pou­vait s’exprimer en allemand.

Hospi­ta­lisé, il est convaincu d’être embau­ché, ce qui donne lieu à un dia­logue aussi poi­gnant que cocasse (p. 37).
Maints autres pro­pos de Shlomo sus­citent la sym­pa­thie du lec­teur et pour lui, et pour sa fille – qui nous apprend au pas­sage avoir quitté la finance pour les lettres, choix tout sauf répandu, méri­tant d’être salué.

En tant que témoi­gnage sur la fin d’une vie, ce roman est bien appré­ciable. En revanche, l’auteure passe un peu trop vite sur l’histoire fami­liale, peut-être à défaut d’avoir fait des recherches à ce sujet (au lieu de repro­duire ce qu’on lui en a raconté), d’où résultent de curieuses inco­hé­rences.
On ne com­prend pas vrai­ment com­ment les parents de Shlomo ont pu déci­der de le faire fuir de Bul­ga­rie en Pales­tine, en novembre 1944 (p. 92), par crainte du nazisme, alors qu’en réa­lité, leur pays d’origine était déjà occupé par l’Armée rouge.
De façon encore plus sur­pre­nante, tout en insis­tant sur les convic­tions com­mu­nistes de son père, Noga Alba­lach n’explique jamais leur appa­ri­tion chez le fils d’un “riche com­mer­çant en tex­tiles“ qui a fui à son tour la Bul­ga­rie com­mu­niste en 1950, mani­fes­te­ment ruiné par le régime en place, pour finir pro­prié­taire d’un kiosque à jour­naux à Tel-Aviv (p. 87).

Si bien que le lec­teur peine à se faire de Shlomo, tel qu’il était avant d’être dimi­nué en son vieil âge, une idée plus vivante que la vague image d’un homme bon et géné­reux.
Mais peut-être sa fille complétera-t-elle ce qui nous frustre ici par un autre récit?

agathe de lastyns

Noga Alba­lach, Le Vieil homme. Des adieux, tra­duit de l’hébreu par Rosie Pinhas-Delpuech, Do, août 2020, 138 p. – 16,00 €

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