La réalité est autre chose que la poésie. Entre les deux, la relation reste étrange et grande la différence. La réel demeure sur quoi on s’écrase, la poésie est l’inverse.
Dès lors, Esther Tellermann brouille les pistes énonciatives de celle et celui que ses textes incarnent pour dire ce que la poésie retrace du réel.
Elle ne triche jamais dans sa façon d’écrire afin d’atteindre l’obscurité du crucial, sa pure présence dans l’être comme dans le monde mais hors psychologie basique.
Au milieu des paysages qui paraissent parfois merveilleux et presque romantiques surgit la présence masculine de l’aimé à qui l’auteure s’adresse en des modulations entre diverses personnes grammaticales.
Existent une alliance, un espérance là où pourtant les vers sont rompus dans un minimalisme de vocabulaire du plus juste effet et une rythmique qui joue des contrastes et des répétitions. Un versant l’autre devient — certes dans la continuité de l’oeuvre — une approche “régressive” - mais dans le sens d’une concision de plus en plus prégnante.
Néanmoins, toute la culture humaine depuis ses origines se retrouve impliquée en un tel chemin.
La montagne devient annonciatrice de tout ce qui se passe en une vie habitée. Elle s’offre ici en deux versants, entre ombre et lumière Le tout dans un renversement et une forme de miroir inversé.
Autant dans le jeu érotique (mais pas seulement) du couple qu’à travers tout ce qui l’entoure dans la conscience de l’auteure.
Celle-ci remet en exergue la question de l’être, celle du mâle et sa contamination dans le cerclage de l’amour dont Esther Tellermann est la consentante victime.
feuilleter le livre
jean-paul gavard-perret
Esther Tellermann, Un versant l’autre, Flammarion, 2020, 154 p. — 18,00 €.