Celui qui défend le doute — entretien avec l’artiste Jean-Marc Scanreigh

Le tra­vail de Scan­reigh est fas­ci­nant. Ses pein­tures et gra­phismes deviennent ce qui ser­pente dans la mémoire pour la seg­men­ter afin que les Mélu­sine s’y immiscent en vibra­tions de formes et de cou­leurs. Certes, nous savons que leur abri n’est que pré­caire : il n’empêche. Mais ce tra­vail devient aussi par­fois la voix qui parle — en les ima­geant — les mots des poètes jusqu’à ce qu’ils frôlent le sexe de l’air.
Un autre jour se lève dans chaque tableau. La chute n’y est jamais une néces­sité ou même une pos­si­bi­lité. Des­sins et cou­leurs détruisent les des­crip­tions objec­tives : les uns et les autres ne forment plus seule­ment des images de quelque chose mais des effluves que le réel recèle à qui sait le mon­trer en le transfigurant.

Entre­tien :

Qu’est-ce qui vous fait lever le matin ?
Hor­loge interne réglée sur « très tôt »

Que sont deve­nus vos rêves d’enfant ?
Je n’arrive pas à être concerné par mon enfance qui me semble avoir été heu­reuse et peu rêveuse.

A quoi avez-vous renoncé ?
A don­ner des leçons.

D’où venez-vous ?
C’est où je vais qui m’intéresse.

Qu’avez-vous reçu en “dot” ?
Une absence de pression.

Un petit plai­sir — quo­ti­dien ou non ?
Café et vie privée.

Qu’est-ce qui vous dis­tingue des autres “graf­fi­teurs” (même si bien sûr votre tra­vail ne se limite pas à cette dimen­sion) ?
Je graf­fite en chambre avec pano­rama exté­rieur sur l’art des autres.

Quelle est la pre­mière image qui vous inter­pella ?
Une mos­quée avec un crois­sant de lune sur­monté de sphères.

Et votre pre­mière lec­ture ?
“Les trois lion­ceaux” en 1954 ou 1955.

Quelles musiques écoutez-vous ?
Sur You­Tube : rock, contem­po­rain tonal, classique.

Quel est le livre que vous aimez relire ?
« Peintres et Vilains » de Mau­rice Pianzola.

Quel film vous fait pleu­rer ?
Je n’aime pas vrai­ment le cinéma.

Quand vous vous regar­dez dans un miroir qui voyez-vous ?
Moi vieillir.

A qui n’avez-vous jamais osé écrire ?
J’ai écrit à tout le monde et reçu presque tou­jours des réponses.

Quel(le) ville ou lieu a pour vous valeur de mythe ?
Strasbourg.

Quels sont les artistes et écri­vains dont vous vous sen­tez le plus proche ?
Le Jas­per Johns tar­dif mâtiné de lettres orne­men­tées de Chaissac.

Qu’aimeriez-vous rece­voir pour votre anni­ver­saire ?
Du bon vin.

Que défendez-vous ?
Le doute.

Que vous ins­pire la phrase de Lacan : “L’Amour c’est don­ner quelque chose qu’on n’a pas à quelqu’un qui n’en veut pas”?
Ni Lacan ni psychanalyse !

Que pensez-vous de celle de W. Allen : “La réponse est oui mais quelle était la ques­tion ?“
Je déteste tout ce qui res­semble à des aphorismes.

Quelle ques­tion ai-je oublié de vous poser ?
La prochaine.

Entre­tien et pré­sen­ta­tion réa­li­sés par jean-paul gavard-perret pour lelitteraire.com, le 21 avril 2020.

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