Celle qui pratique la photo-thérapie aime citer une phrase de Nan Goldin qui synthétise son travail, principalement, de portraitiste : « Pour moi, ce n’est pas un détachement de prendre une photo. C’est une façon de toucher quelqu’un – c’est une caresse… Je pense que vous pouvez réellement donner aux gens l’accès à leur propre âme. » Celles et ceux dont elle ouvre la psyché sont souvent nus. Mais, sous une présence physique intense et parfois “caliente”, la pudeur reste de mise.
“Mon travail photographique s’adresse principalement aux personnes à pénis, qui sont manifestement en sous-représentation dans le vaste monde du nu” écrit-elle. Pour autant, les femmes ne sont pas ostracisées, néanmoins c’est une manière de remettre les pendules à l’heure. Céline Pivoine se laisse emporter par ses modèles et chaque projet avance sans idée préalable. L’intuition est de mise sans doute parce qu’une technique totalement maîtrisée permet ce saut dans le “vide” — entendons le “vide” latin : “vois”).
Entretien :
Qu’est-ce qui vous fait lever le matin ?
Tout ce que j’ai envie de faire dans la journée qui se présente.
Que sont devenus vos rêves d’enfant ?
Je les ai réalisés, ou suis en train de le faire encore.
A quoi avez-vous renoncé ?
Sans réfléchir, je dirais à rien.
D’où venez-vous ?
D’une autre planète (on me le dit souvent ! Et je le ressens parfois).
Qu’avez-vous reçu en dot ?
Le goût du travail.
Un petit plaisir — quotidien ou non ?
Enfourcher ma moto et sentir la liberté.
Qu’est-ce qui vous distingue des autres photographes ?
Ma personnalité, mon regard sur ce qui m’entoure.
Comment définiriez-vous votre approche du portrait ?
Je n’en ai pas particulièrement, elle est la même que pour les autres photos de personnes : mettre suffisamment la personne à l’aise pour qu’elle soit le plus naturel possible dans le sens qu’elle donne le meilleur d’elle-même.
Quelle est la première image qui vous interpella ?
Comment pourrais-je m’en souvenir ?
Et votre première lecture ?
Je ne peux pas citer une première lecture qui m’aurait interpelée comme une référence, je ne relève pas ce genre de choses
Quelles musiques écoutez-vous ?
Une grosse tendance rock, country et blues sans avoir un style particulier ; j’aime le son de la basse (dont je joue en amateur) et les voix féminines (mais pas toutes).
Quel est le livre que vous aimez relire ?
Celui que j’ai le plus relu est « La nuit des temps » de Barjavel, mais en général je ne relis pas un livre car j’en ai tellement d’autres à lire.
Quel film vous fait pleurer ?
“Alabama Monroe”, à chaque fois et plusieurs fois dans le film.
Quand vous vous regardez dans un miroir qui voyez-vous ?
Moi.
A qui n’avez-vous jamais osé écrire ?
A personne, la seule à qui je n’avais pas osé le faire, j’ai sauté le pas il y a quelques années.
Quel(le) ville ou lieu a pour vous valeur de mythe ?
Aucune idée… pourquoi se limiter à une ou pourquoi en avoir ?
Quels sont les artistes et écrivains dont vous vous sentez le plus proche ?
Je ne regarde pas le travail des autres, par crainte d’en être trop inspirée ou de plagier. Je connais encore trop peu d’artistes photographes, et encore moins dans les plus connus (je n’aime pas la célébrité en général).
Qu’aimeriez-vous recevoir pour votre anniversaire ?
Un bon pour le tour du monde sur une période illimitée.
Que défendez-vous ?
La liberté d’être qui je suis, c’est déjà pas mal.
Que vous inspire la phrase de Lacan : “L’Amour c’est donner quelque chose qu’on n’a pas à quelqu’un qui n’en veut pas”?
Je ne partage pas cet avis. Pour avoir longtemps réfléchi sur la question, l’amour serait pour moi plutôt de donner ce qu’on a à quelqu’un qui en veut mais qui en a aussi pour lui-même suffisamment pour pouvoir en donner en retour.
Que pensez-vous de celle de W. Allen : “La réponse est oui mais quelle était la question ?“
Une façon de toujours rester positif.
Quelle question ai-je oublié de vous poser ?
Je me demande bien…
Présentation et entretien réalisés par jean-paul gavard-perret pour lelitteraire.com, le 14 avril 2020.