Harcèlement virtuel et règlements de compte en série
Linwood Barclay, auteur américo-canadien, s’est fait connaître par le grand public avec Cette nuit-là (Belfond-2009) et enchaîne depuis les succès. Des titres comme Contre toute attente (2013), Fenêtre sur crime (2014), Celle qui en savait trop (2015) ont vite trouvé leur place dans le top 20 des ventes de thrillers.
Champ de tir est son dix-septième roman traduit en français, et fait suite à sa série de livres qui prend place dans la petite ville de Promise Falls, avec des personnages récurrents comme l’inspecteur Duckworth ou le privé Cal Weaver. Si on peut penser que cette série n’est pas forcément la meilleure de ses œuvres, ce dernier volet nous réserve tout de même d’agréables surprises. Après un début peu alléchant, l’histoire offre vite de multiples rebondissements pour nous proposer un final explosif.
Tout débute avec l’arrivée d’un homme désorienté dans le commissariat de la ville. L’homme affirme avoir été kidnappé et brutalisé, et plus surprenant encore : un tatouage dans son dos l’accuse d’être un meurtrier. L’inspecteur Duckworth va vite s’apercevoir que cette affaire est bien plus compliquée qu’elle n’y paraît, surtout quand le kidnappé n’a aucun souvenir de ce qui a pu lui arriver.
Parallèlement à cette enquête, son ami Cal Weaver, accepte de protéger le jeune et riche Jeremy Pilford. Du haut de ses dix-huit ans, Jeremy devrait avoir toute l’insouciance de la jeunesse. Pourtant, il a été jugé responsable du décès d’une jeune fille dans une sombre affaire d’homicide involontaire. Big Baby, ainsi surnommé par la presse en raison de la surprotection de sa famille, est depuis lors la cible de menaces de mort sur Internet. Difficile pour Weaver de bien assurer la protection de Jeremy, car ses harceleurs se cachent derrière des groupes en ligne, décidés à faire justice eux-mêmes.
Promise Falls , qui ne s’est toujours pas remise d’un attentat qui a causé de nombreux morts, va encore voir sa réputation de ville ‘maudite’ écornée par ces deux affaires.
On pourrait croire que l’on va détester les personnages que les forces de l’ordre sont amenées à protéger et, pourtant, leur vécu complexe va vite nous amener à réfléchir sur le bien-fondé de cette chasse aux sorcières des temps modernes, qui se déroule dans une région touchée par la crise économique et une criminalité hors norme. Le harcèlement via les réseaux sociaux est subtilement abordé, ainsi que le thème de l’auto-justice.
L’enquête est bien menée et donne lieu à plus de rebondissements que l’on aurait cru. Linwood Barclay est passé maître dans le page-turner au même titre qu’Harlan Coben, ou Rachel Abbot. Et dans son nouvel opus, mieux vaut ne pas être pris pour cible dans ce ‘champ de tir’, car la nouvelle victime du suspense grandissant pourrait bien être le lecteur.
franck boussard
Linwood Barclay, Champ de tir, Belfond Noir, mars 2020, 480 p. — 21, 90 €.