Claudine Bertrand & Joël Leick, Rêves de paysage

 Wonder pas­sion

Avec un style sou­vent lapi­daire, les mots d’un tel livre sont au ser­vice d’ un « pay­sage » dont Clau­dine Ber­trand, telle une “Der­nière femme” devient la voyelle, la pierre sau­vage. Elle l’éclaire par tres­saille­ments pour en déli­vrer les secrets. Mais, dans ce lieu, elle n’est pas for­cé­ment seule. Peut se « croi­ser un homme au hasard » pour une jubi­la­tion de l’éros que sou­ligne une der­nière photo de Joël Leick : buste nu de femme recou­vert de mon­naie du pape. C’est comme si l’amour venait moins pour cas­ser le cours des choses que ren­for­cer le che­min de la vie et  inven­ter la com­mu­nauté inavouable au sein d’une entropie.

Existe un jeu entre l’imaginaire et à la réa­lité, bref entre deux uni­vers et des lieux inso­lites sou­li­gnés par les pho­to­gra­phies en noir et blanc de Joël Leick. Le pay­sage est à la fois simple et com­plexe car en lui et ses sur­plombs et para­digmes “Le ciel défait ma che­ve­lure / délivre des sons /sur la plage offerte”.
Cette che­ve­lure n’est en rien bau­de­lai­rienne mais s’ouvre à la fic­tion et la chute qui inter­rogent à leur façon la ques­tion du nous, de l’amour, ses fris­sons, ses sen­sa­tions, ses ivresses et son tumulte intérieur.

La pas­sion est là sans forme alam­bi­quée mais celle qui écri­vait : « depuis le début des temps / je m’appelle Constance / mal­gré tout je me sens prête à décol­ler » reste dans sa sen­sua­lité exis­ten­tielle. La chair filtre, la langue s’évade et jusqu’au ventre glisse une pluie de bai­sers là où le réel s’épuise avant que, plus loin, après, les pho­tos de Leick avec leurs arbres aux branches impor­tunes créent un autre pay­sage secret.
Le monde une fois encore devient pas­sion et l’auteure son pas­seur, qu’importe si une « héroïne / empri­son­née » semble bri­sée.  Les his­toires d’amour se font encore étreintes obs­ti­nées “d’une langue à l’autre” en des  caprices allon­gés et iso­lés de l’horizon.

Mieux qu’une pile Won­der la pas­sion ne s’use pas lorsque les amants en usent et en abusent en une réclu­sion qu’ignorent les abbesses elles-mêmes.

jean-paul gavard-perret

Clau­dine Ber­trand & Joël Leick, Rêves de pay­sage, Edi­tions Ber­nard Dumer­chez, 2020 — 12,00 €. 

1 Comment

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One Response to Claudine Bertrand & Joël Leick, Rêves de paysage

  1. Anne Marie Carreira

    Cette che­ve­lure n’est en rien bau­de­lai­rienne mais s’ouvre à la fic­tion et la chute qui inter­rogent à leur façon la ques­tion du nous, de l’amour, ses fris­sons, ses sen­sa­tions, ses ivresses et son tumulte intérieur.

    JOGP nous emporte avec ses écrits, ses mots magiques et si humains, qui nous font du bien en ce moment où le confi­ne­ment nous réduit au silence ! UM GRAND MERCI !

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