Seven

Avarice. Colère. Envie. Gour­man­dise. Luxure. Orgueil. Paresse. Les sept pêchés capitaux.

Selon Saint Augus­tin qui les a nom­més pour la pre­mière fois, ce ne sont pas les plus graves mais ceux qui sont à l’origine de tous les autres. Nombre par­fait et sym­bole de l’abondance divine, 7 est aussi selon la Bible le nombre du châ­ti­ment, de la puri­fi­ca­tion et de la péni­tence (Il est d’ailleurs attri­bué à Satan qui s’efforce de copier Dieu dont il se fait le singe. Ainsi la bête infer­nale de l’ Apo­ca­lypse — Ap. 13,1 — a sept têtes). Au coeur de ces péchés comme au coeur du film de David Fin­cher, sorti sur les écrans en 1995, la luxure. Vor­tex noir de ce par quoi l’homme s’abîme en son autre, et perd le sens de ses origines.

C’est l’histoire du pas­sage de relais entre deux détec­tives, William Somer­set (Mor­gan Free­man) et David Mills (Brad Pitt) qui se trouvent confron­tés à une série de meurtres incom­pré­hen­sibles com­mis pour illus­trer cha­cun des sept péchés capi­taux au tra­vers d’une mise en scène machia­vé­lique. Dans l’enfer, glauque et cré­pus­cu­laire de New York, battu en per­ma­nence par la pluie, où moi­sis­sures et pour­ri­tures croissent comme chien­lit au soleil, la luxure — le désir sexuel, la pra­tique des plai­sirs sexuels — revêt une aura par­ti­cu­lière. Car elle est ce moment où l’obscurité du quo­ti­dien est trouée par la lumière de la révé­la­tion.
Le qua­trième meurtre sériel cor­res­pond à la stase de la luxure : une pros­ti­tuée meurt le sexe labouré par le membre d’un client sur lequel a été greffé une corne-prothèse d’acier. Plus que l’appétence char­nelle, c’est sur­tout le désir de suivre son désir — vers quelque objet , quelque com­pul­sion qu’il tende — en quoi consiste la véri­table luxure ici. Une inten­tio au sens propre dont ne sont pas exempts les détec­tives Somer­set et Mills. Si toute conscience, pour reprendre le pré­cepte phé­no­mé­no­lo­gique hus­ser­lien est conscience de quelque chose, elle est aussi conscience du pire.

Anti-baptême per­ma­nent qui empêche que s’efface le péché ori­gi­nel contracté par le genre humain en la per­sonne d’Adam et dont tout être humain est cou­pable à la nais­sance, la pluie grise qui nimbe les pro­ta­go­nistes de Seven signi­fie qu’il n’y aura pas de rémis­sion. (On dirait que le réa­li­sa­teur a tourné le film entier sans aucune lumière, ou si peu). De cet uni­vers toute croyance au pro­grès ratio­na­liste, tout fiat lux a dis­paru. Mais Somer­set reste jusqu’au bout, tel Vir­gile éclai­rant Dante dans les enfers, pour gui­der Mills, lequel mul­ti­plie les chutes (il se blesse le bras à un moment donné, sur le point d’arrêter le tueur à son domi­cile, se luxant presque l’épaule) et refuse néan­moins de lâcher son nou­veau Job.
De fait, en dépit de leurs lampes-torches qu’ils braquent à tout bout de champ sur les ténèbres, c’est bien au monde de l’ombre, à la noir­ceur des abysses de la déshu­ma­ni­sa­tion, qu’appartiennent autant les détec­tives que John Doe, le meur­trier (Kevin Spa­cey) qu’ils pour­chassent (encore que ce soit plu­tôt lui qui les traque en défi­ni­tive, ne lais­sant des indices en hom­mage au Para­dis perdu, à La Divine comé­die ou au Mar­chand de Venise que parce qu’il le veut bien).

Dans un film étouf­fant, sorte de glu létale dédiée à la nuit de l’âme, Fin­cher ren­voie la lumière (phy­sique, morale) à une fonc­tion adven­tice ou des­truc­trice puisqu’elle n’entrave en rien la trans­gres­sion volon­taire des pres­crip­tions reli­gieuses stig­ma­ti­sée par Mills, cette zone d’ombre dont ne par­vient pas à s’extraire celui-là même qui incarne l’angélisme béat et qui abat le serial killer venant au grand jour d’exécuter sa femme. Oppressé par la morale et le châ­ti­ment dont le bien-fondé lui échappe devant l’injustice suprême, l’homme est condamné à invo­luer, à ne trou­ver l’apaisement qu’auprès des bouches d’ombre des pul­sions tha­na­tiques — le pire est que per­sonne in fine ne décrypte pour­quoi l’anonyme John Doe se trans­forme en un monstre moderne !

L’ange blond devien­dra por­teur de lumière spec­trale puisqu’il ne sup­porte pas qu’on le prive de son soleil. Il est des black out éthiques. Quod erat demons­tran­dum.
Le grand lux(e), n’est-ce pas de choi­sir qui on ne veut plus être ? Because of the way it assaults the emo­tions, seeing Seven should not be taken lightly (à la légère) à écrit un cri­tique amé­ri­cain : com­ment donc un film sans « lux » pourrait-être « light » ? Seven ou quand l’esprit dark règne sur Terre.

fre­de­ric grolleau

Seven

Réa­li­sa­teur : David Fin­cher Avec : Brad Pitt, Mor­gan Free­man, Gwy­neth Pal­trow, Kevin Spa­cey, R. Lee Ermey, Richard Round­tree / • Date de paru­tion : 22 août 2001 • Édi­teur : Seven 7 Pré­sen­ta­tion : Snap Case / For­mat image : Ciné­ma­scope — 2.35:1 Full Screen (Stan­dard) — 1.33:1 / Zone et for­mats son : Zone : Zone 2 Couches : deux couches Langues et for­mats sonores : Fran­çais (Dolby Digi­tal 5.1), Anglais (Dolby Digi­tal 5.1) Sous-titres : Français

Bonus : • Le Making Of en VOST • La scène cou­pée du film en VOST • Les fil­mo­gra­phies des acteurs, du réa­li­sa­teur et du pro­duc­teur • Les bandes-annonces en VF et VOST Prix : 16,50 €.

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