Présence et existence
Du noir émerge un dialogue violent entre trois ados : des invectives injurieuses lancées comme une volée de flèches acérées ouvrent le propos de façon percutante.
Les jeunes s’interrogent sur l’éventualité d’être en train de croiser la route d’un robot ; robot qui aurait nécessairement l’apparence d’une fille. La féminité serait-elle artificielle ?
On ne se croit pas sur parole. On veut des preuves. On en retrouve deux parmi un groupe de jeunes garçons engagés dans un stage pour reconstituer leur virilité ; stage aux allures de camp militaire.
Les mâles en viennent à s’interroger sur une masculinité qu’ils cherchent à retrouver, pour faire face à la féminisation, à la robotisation de la société.
Les tableaux qui s’enchaînent présentent des situations tendues, indépendantes les unes des autres, mais reliées par le questionnement induit par la commercialisation et la banalisation des automates de forme androïde.
Les machines s’insinuent dans nos vies quotidiennes pour en chahuter les valeurs. Progressivement, les relations hybrides qui se nouent avec ces robots anthropoïdes interrogent en retour notre humanité. Se construit une réflexion sur la mécanisation du monde : au lieu de répondre par l’affect et par la communauté de nos sentiments, nous mettons en avant l’artifice de la virilité, ce qui fait de nous des êtres réactifs, prédateurs.
Une grande subtilité, beaucoup d’ironie dans la représentation des limites de notre discernement face aux écarts dont la robotique pourrait nous affecter – nous affecte déjà. C’est face à la rupture, à la mort, que l’androïde et l’humanité pourront se rencontrer dans leur différence.
Un spectacle juste, fort, bien senti, terriblement révélateur. Par son choix de faire jouer les jeunes garçons par de jeunes actrices, Pommerat illustre la relation dynamique, pointe les dilemmes entre élans personnels et puissance des représentations sociales dans la construction des identités.
De ce noir qui lui est si familier, Pommerat fait émerger une grande clarté : on se dit qu’il sait, lui, de quoi il s’agit : de rien d’autre que nous faire penser.
christophe giolito & manon pouliot
Contes et légendes
une création théâtrale de Joël Pommerat
Avec
Prescillia Amany Kouamé, Jean-Edouard Bodziak, Elsa Bouchain, Lena Dia, Angélique Flaugère, Lucie Grunstein, Lucie Guien, Marion Levesque, Angeline Pelandakis, Mélanie Prezelin.
Scénographie et lumières Eric Soyer ; recherches / création costumes Isabelle Deffin ; création perruques et maquillage Julie Poulain ; son François Leymarie, Philippe Perrin ; création musicale Antonin Leymarie ; dramaturgie Marion Boudier ; renfort dramaturgie Elodie Muselle ; assistante observatrice Daniely Francisque ; renfort assistant Axel Cuisin, Lucia Trotta ; assistante mise en scène Roxane Isnard ; construction décors Ateliers de Nanterre-Amandiers ; construction mobilier Thomas Ramon – Artom.
Au théâtre Nanterre-Amandiers du 9 janvier au 16 février 2020, les mardis, mercredi et vendredi à 20h30, les jeudis à 19h30, les samedis à 18h et les dimanches à 16h.
Au théâtre Olympia à Tours, du 3 au 7 mars 2020.
Au théâtre de la Cité à Toulouse du 13 au 20 mars 2020.
A l’espace Jean Legendre de Compiègne les 26 et 27 mars 2020.
Au CDN Orléans Centre Val de Loire les 2 et 3 avril 2020.
A la Comédie de Clermont-Ferrand du 8 au 10 avril 2020.
Au Phénix, Scène Nationale Valenciennes les 28 et 29 avril 2020.
A l’Estive, Foix, les 5 et 6 mai 2020.
Au théâtre de la Criée, Marseille, du 13 au 17 mai 2020.
A Châteauvallon, Scène Nationale, Ollioules, du 27 au 29 mai 2020.
A la MC2 Grenoble du 9 au 13 juin 2020.
Production Compagnie Louis Brouillard ; coproduction Nanterre-Amandiers — Centre dramatique national, La Coursive — Scène nationale de La Rochelle, Comédie de Genève, le Festival d’Anjou, La Criée — Théâtre National Marseille, Théâtre français du Centre national des Arts du Canada — Ottawa, La Filature — Scène nationale de Mulhouse, Le Théâtre Olympia – Centre dramatique national de Tours, Espace Malraux — Scène nationale de Chambéry et de la Savoie, Bonlieu — Scène nationale d’Annecy, L’Espace Jean Legendre — Théâtre de Compiègne, La Comète — Scène nationale de Châlons-en-Champagne, Le Phénix — Scène nationale de Valenciennes, L’Estive — Scène nationale de Foix et de l’Ariège, la MC2 — Scène nationale de Grenoble, Le Théâtre des Bouffes du Nord, ThéâtredelaCité – CDN Toulouse Occitanie, et le Théâtre National de Bruxelles. En cours…
Avec le soutien de Coq Héron Productions et les Manufactures Février.
Action financée par la Région Ile-de-France.
Cette création bénéficie d’une aide du Ministère de la Culture.
La Compagnie Louis Brouillard reçoit le soutien du ministère de la Culture et de la Communication / Drac Île-de-France et de la région Île-de-France.
Joël Pommerat fait partie de l’association d’artistes de Nanterre-Amandiers
La Compagnie Louis Brouillard est associée à la Coursive/Scène nationale de La Rochelle et à la Comédie de Genève, et à partir de Janvier 2020, au Théâtre National Populaire de Villeurbanne.
Tous les textes de Joël Pommerat sont publiés aux Editions Actes Sud-papiers
Photo(s) © Elisabeth Carecchio.