Fables d’Esope précédé d’Une Vie d’Esope

Le creu­set Esope

Esope ne doit-il pas ser­vir qu’à sour­cer les Fables de La Fon­taine. Et ce, pour la glo­ri­fi­ca­tion de ce der­nier et de bien d’autres avant lui ? D’autant que ces textes grecs ne sont qu’un conglo­mé­rat  d’une “voix” mul­tiple et d’une tra­di­tion dont Esope est moins auteur qu’une “marque” ou un cachet.
Certes, Esope a bien existé. Il est bien un “logo­poïos” (créa­teur d’histoire) du VIème siècle, d’origine thrace, esclave et affran­chi et vic­time d’un com­plot par les habi­tants de la ville de Delphes. Tou­te­fois, dans La vie d’Esope (dont le rédac­teur est ano­nyme) il est pré­senté comme affreux à voir, bossu, énorme, monstre du jour et de la nuit, han­di­capé, bègue de sur­croît. Ce qui est consi­déré comme le pre­mier roman grec construit de fait un per­son­nage pica­resque et contre­fait entiè­re­ment fictif.

Sa lai­deur sup­po­sée est celle d’anti-miroir ou de contre-emblème de la fable elle-même et de son charme dont Esope est devenu le modèle, le fanion, le sym­bole. Grâce à lui et sa com­pi­la­tion la Fable, de fille indigne de la lit­té­ra­ture, va évo­luer et son image sor­tir d’un cer­tain ruis­seau. Certes, il fau­drait par­ler plus de fable éso­pique que d’Esope.
Ce qui fut fait par­fois au fil du temps avant que La Fon­taine redonne au cor­pus l’appartenance à son porte-voix à côté de Phèdre, pre­mier auteur attesté à publier des fables en vers.

Cette réédi­tion et nou­velle tra­duc­tion montre com­ment les fables éso­piques sont des récits d’anecdotes d’animaux entre eux ou avec les hommes et dont peut se tirer un ensei­gne­ment. Sou­vent brèves et sans grande qua­lité lit­té­raire — mais néan­moins avec quelques trou­vailles sty­lis­tiques -, les fables en ce cor­pus offrent des synop­sis et réper­toires per­sua­sifs que, de fait, La Fon­taine (et il n’est pas le seul) aura magni­fié pour un plai­sir de lec­ture beau­coup plus grand et de nature véri­ta­ble­ment poli­tique et poé­tique.
Comme l’écrit Antoine Bis­ceré, il s’agit alors d’ouvrir le genre plus que de pas­ser  “par une porte déro­bée” rudi­men­taire et sans ampleur des épi­sodes éso­piques pro­saïques. Ils ont pour­tant, comme le prouve cette édi­tion, leur propre intérêt.

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jean-paul gavard-perret

Fables d’Esope, pré­cédé d’Une Vie d’Esope, édi­tion d’Antoine Bis­ceré et tra­duc­tion de Julien Bar­dot ‚ Gal­li­mard, col­lec­tion Folio clas­sique, 2020, 448 p. — 8,50 €.

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