Doïna Vieru donne une intensité aux processus de dislocation du langage articulé. Et ce, afin que ce ne soit plus seulement l’esprit qui souffle sur ses dessins mais le corps lui-même. Au désastre des écritures à travers l’Histoire répond la façon dont l’artiste s’en empare et les triture.
Dans un glissement hors de leur sens, elle laisse néanmoins apparaître des entre-lueurs qui éclairent un champ dévasté rongé, raturé d’encre, d’acrylique blanche, de fusain. Des restes du langage jaillit un autre langage jamais prononcé mais que la créatrice fait parler.
Retournant sur les chemins des désastres, elle les insémine de ce qui interrompt le logos et ferme peut-être l’absence. Existe donc un couple de ressemblance et différence dans ce jeu d’un proche que l’on croit reconnaître mais qui demeure lointain. L’épuisement des mots appelle une autre présence.
Celle de l’écart que la créatrice entreprend là où les formes ne se gavent plus de paroles.
jean-paul gavard-perret
Doïna Vieru, Re-écriture du désastre, Galerie de Nesle, 8 rue de Nesles 75006 Paris, à partir du 20 février 2020.