Sarah Mostrel enracine ses peintures dans ses textes, et ceux-ci dans les premières en une sorte de condensé d’existence qui permet à la créatrice à la fois de passer et tracer son chemin quitte parfois à le rebrousser quand le discernement et le bon sens nécessitent parfois de dire leur fait aux don juju, aux don juan et ce qu’ils prennent pour leur “poil supérieur”.
Ils font d’eux des êtres de sac et de corde peu recommandables qui finiront en guise de punition “fragiles et vieux”.
L’auteure et peintre le souligne mais sans se lamenter. Si elle se sert de ses pleurs, c’est pour diluer la couleur afin de mieux “rire dans l’absurde”. Car la vie étant si compliquée, il ne faut pas demander l’impossible à qui que ce soit. Les peintures accordent ainsi lumière et couleur à l’humaine engeance aussi bancale que le monde qu’elle a créé.
C’est d’ailleurs la seule logique de tous ceux qui, se croyant penseurs, ne sont que le contraire. Et l’auteure de citer pour le prouver Pierre Desproges : “L’ennemi est bête : il croit que c’est nous l’ennemi alors que c’est lui !”.
Mais si l’homme est incapable de clairvoyance, Sarah Mostrel lui donne sinon une leçon du moins une manière de se rincer l’oeil par ses peintures — en rien obscènes. C’est juste une manière de jeter l’eau du bain mais pas le gros bébé. Celui-ci, à force de s’user la mémoire, ne laisse “que les traces interprétées par l’histoire”.
Mais la créatrice, plutôt que de craindre que les horreurs des siècles se répètent en ces sales affaires, délivre en fin de parcours une leçon moins donnée et acquise qu’à méditer avec courage : “il est bon de se rappeler le futur”.
Bref, ce livre en ses images et ses poèmes devient celui des questions. Les réponses n’en sont pas simples.
jean-paul gavard-perret
Sarah Mostrel, Rien à voir suivi de Les (re)plis de l’histoire, Z4 éditions, Le Monthury, 39300 Les Nans, 2020, 72 p. — 15,00 €.