Alain Blondy, Paul Ier. La folie d’un tsar

Le tsar éphémère

Le règne du tsar Paul Ier, pris en étau entre celui de sa mère la grande Cathe­rine II et de son fils Alexandre Ier, le vain­queur de Napo­léon, n’a laissé que peu de traces. Un temps de tran­si­tion, confus, dés­équi­li­bré, semé de ruptures.

Alain Blondy ne cherche pas à réha­bi­li­ter ce per­son­nage dont il ne cache aucun des tra­vers ni aucune des fai­blesses. Il livre cepen­dant une ana­lyse très pré­cise du per­son­nage et de son règne, après avoir consa­cré de longues et denses pages à ses années d’attente de prince héri­tier – abso­lu­ment déci­sives dans la genèse des déci­sions prises une fois la cou­ronne impé­riale sur sa tête.
Une enfance mal­heu­reuse, un père dont il ne sait s’il est son fils, de sur­croît détrôné et assas­siné, une mère exé­crée parce qu’usurpatrice, froide, dis­tante et mépri­sante, une jeu­nesse soli­taire, un pre­mier mariage pré­co­ce­ment endeuillé : on n’en fini­rait pas de réci­ter la lita­nie des mal­heurs tom­bant sur cet homme dont l’équilibre men­tal fut pro­fon­dé­ment affecté.

Cette étude, enri­chie de nom­breux docu­ments d’archives, donne aussi l’occasion de se plon­ger dans une époque char­nière de l’histoire de la Rus­sie, celle de la dif­fi­cile sta­bi­li­sa­tion du pou­voir, des règles de suc­ces­sion, mais aussi celle où le rayon­ne­ment et la puis­sance du pays en Europe fran­chissent des étapes déci­sives ; et ce alors que le conti­nent est bou­le­versé par l’émergence de la révo­lu­tion fran­çaise.
A cet égard, Alain Blondy apporte des élé­ments nou­veaux et très éclai­rants sur l’affaire de l’ordre de Malte, véri­table obses­sion de Paul Ier qui n’eut de cesse de vou­loir le pla­cer sous son auto­rité, pour mieux implan­ter la Rus­sie en Médi­ter­ra­née. Les rela­tions avec l’Angleterre ne s’en relè­ve­ront pas. D’où un retour­ne­ment diplo­ma­tique majeur qui condui­sit le tsar à se rap­pro­cher de la France de Bona­parte, à chas­ser sans ména­ge­ment le pauvre Louis XVIII et à mécon­ten­ter gra­ve­ment aussi bien Londres que le clan anglo­phile à la Cour de Saint-Pétersbourg.

Il y eut bien, dans l’assassinat de ce tsar mys­té­rieux, un aspect cru­cial de poli­tique étrangère.

fre­de­ric le moal

Alain Blondy, Paul Ier. La folie d’un tsar, Per­rin, jan­vier 2020, 333 p. — 24,00 €.

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