Manu Larcenet, Thérapie de groupe – t.01 : “L’étoile qui danse”

Une médi­ca­tion contre la morosité 

Manu Lar­ce­net, auteur d’une belle col­lec­tion de bandes des­si­nées, pro­pose une nou­velle série autour de l’inspiration, de la créa­tion et de ses mys­tères. Com­ment celle-ci vient-elle aux scé­na­ristes, aux roman­ciers ? Quels méca­nismes faut-il faire fonc­tion­ner pour la rendre opé­ra­tion­nelle ? L’angoisse de la page blanche, presque tous la connaissent, le trou noir dont aucune idée n’émerge touche les meilleurs et les plus pro­li­fiques créa­teurs.
Manu Lar­ce­net empoigne cette idée et traite ce sujet dif­fi­cile, dou­lou­reux avec un humour débor­dant d’énergie, avec une capa­cité d’analyse remar­quable, avec un ton iro­nique et tendre, avec une belle série de situa­tions dro­la­tiques à l’extrême.

Jean-Eudes de Cageot Gou­jon, plus connu sous le pseu­do­nyme de Manu Lar­ce­net, est un des­si­na­teur de BD au som­met de sa gloire. Il a gagné une for­tune supé­rieure à celle des Bet­ten­court. Mais, depuis quelques temps, il n’a plus de ces idées géniales qui le carac­té­ri­saient, qui lui per­met­taient de publier un chef-d’œuvre tous les trois ou quatre mois. Il tra­vaille pour­tant, mais tout ce qu’il des­sine est insi­pide. « C’est le trou noir sur la page blanche ».
Inter­viewé par Jean-Jacques, il débite un dis­cours for­maté qui ne fait, tou­te­fois, plus illu­sion. Le jour­na­liste lui confie que Nietzsche a écrit, à pro­pos de la créa­tion : “Il faut du chaos en soi pour enfan­ter une étoile qui danse.” Et du chaos en lui, Manu en a… à revendre !

Il explore les façons dont l’inspiration venait aux créa­teurs, de la pré­his­toire à nos jours en fai­sant une belle étape à l’époque de la Renais­sance. Il évoque la vie facile des peintres rupestres car ils se bor­naient à repré­sen­ter ce qu’ils voyaient. Il raconte l’existence douce des artistes de la Renais­sance, gui­dés qu’ils étaient par les muses, elles-mêmes les assis­tances de direc­tion de Dieu. Il suf­fi­sait de se lais­ser gui­der. Quelques pages montrent un Paul Cézanne vin­di­ca­tif face à l’attitude de l’illustrateur de bandes des­si­nées.
L’auteur mêle les séquences de la vie fami­liale, décri­vant en paral­lèle la jour­née de son épouse, vété­ri­naire de pro­fes­sion et maî­tresse de mai­son, et sa jour­née de scénariste-dessinateur à la mai­son. C’est à la fois drôle, mali­cieux et grin­çant car proche de l’accablante réa­lité connue par trop de femmes.

Larce­net oppose les dépres­sifs aux joyeux drilles, allant jusqu’à décrire une guerre entre ces deux caté­go­ries d’individus. Mais ces textes inci­sifs, per­cu­tants sont por­tés par un gra­phisme en syner­gie. Il montre tout son talent de des­si­na­teur avec un ensemble de planches diverses et très variées. Il passe du des­sin rupestre aux tableaux reli­gieux du Quat­tro­cento, du manga aux scènes psy­ché­dé­liques.
Avec Thé­ra­pie de groupe, Manu Lar­ce­net entame une nou­velle série ter­ri­ble­ment drôle, à par­tir d’un sujet bou­le­ver­sant et qui, par nature, ne prê­te­rait pas à rire.

voir  “Com­ment j’ai des­siné Thé­ra­pie de groupe par Manu Lar­ce­net

serge per­raud

Manu Lar­ce­net (scé­na­rio, des­sin et cou­leur), Thé­ra­pie de groupe – t.01 : L’étoile qui danse, Dar­gaud, jan­vier 2020, 56 p. – 14,99 €.

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Filed under Bande dessinée, Chapeau bas

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