Résorption et absorption fantômales
Aurore Pallet est toujours en chasse sur Internet et ailleurs pour collecter des images afin de les soumettre à sa stratégie de montage. De nouveau, des mondes superposables viennent se chevaucher.
Ici, elle part d’un document de 1976 de Werner Herzog à Basse-Terre, en Guadeloupe. “Toute la ville vient d’être évacuée alors que le volcan de la Soufrière menace d’exploser. Informé de la présence sur place de plusieurs habitants ayant refusé de partir, le réalisateur allemand décide d’aller à leur rencontre et de filmer les dernières heures de la ville. Les images qu’il nous lègue sont celles d’une cité fantomatique, pétrifiée par le silence.” écrit Aurore Pallet.
Et à partir de là, elle transforme ce matériau en images indicibles sombres captivantes qui peuvent se lire de diverses manières. Ces visions hantent par leur version du monde qui semble nous indiquer une série d’avertissements et de prémonitions.
Cet ensemble saturé et spectral crée une vision fantômale par les reprises que l’artiste fait par peinture à l’huile. Elle se superpose parfois au langage.
Existe tout un jeu d’écho par résorption et absorption, là où la fin d’un monde est en jeu dans les dernières images des fumées de souffre et un paysage de recommencement du monde où la voix du narrateur conclut dans le film de Herzog : “Maintenant, ce sera un documentaire sur une catastrophe inévitable, qui ne s’est jamais produite.“
Mais, avec Aurore Pallet, il y a bien plus encore. Kafka n’est jamais loin.
jean-paul gavard-perret
Aurore Pallet, Les Terres Jaunes, Galerie Isabelle Gounod, Paris, Du 25 janvier au 22 février 2020.