Erik Orsenna — qui joue toujours le finaud — présente son roman sous forme de longue lettre à une juge des affaires familiales pour s’excuser de lui avoir fait perdre son temps suite à son divorce suite à une idylle de quatre années. “Après L’Exposition coloniale, après Longtemps, l’heure était revenue pour moi de m’embarquer pour la seule exploration qui vaille : aimer.» . Voire.
Les affres passées semblent s’oublier au moment où la juge s’est fendu d’un “Dommage, je sentais beaucoup d’amour en vous.”
C’est le prétexte pour l’auteur - afin de se retrouver — de “briser en nous la mer gelée” en allant jusqu’au Grand Nord “dans la patrie des vieux chercheurs d’or et des trésors perdus, refuge des loutres de mer, des libraires slavophiles et des isbas oubliées.” Le roman est donc celui de l’amour et de sa brisure qui va finir dans une mer gelée.
Le texte est parfois drôle aux côtés de ce marié pour la quatrième fois et qui, en conséquence, ne reçoit plus de cadeaux. Tout cela reste néanmoins de l’ordre du cliché un peu gnangnan. N’est pas Lubitsch qui veut — même en littérature.
Orsenna semble plus connaisseur en mer et en mère qu’en femme même s’il est réputé spécialiste du deuxième sexe. Ici — et sans doute comme en amour — il ne se fatigue pas beaucoup. Tout cela sent la prothèse de hanche et la biscotte sans sel et gluten avec copinage appuyé (pour Fottorino par exemple). A oublier très vite.
On peut même largement s’en passer. L’amour et ses affres mérite mieux que cette suite de galéjades épistolaires qui, en se voulant mirobolantes, ne sont que de l’ordre de l’effet farce.
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jean-paul gavard-perret
Erik Orsenna, Briser en nous la mer gelée, coll. Blanche, Gallimard, Paris, 2020, 464 p. — 22,00 €.