Nathalie Léger, L’Exposition

Un moi sans nom

Dans son roman, Natha­lie Léger invente une flo­con­neuse den­sité par d’étranges lacis afin de nous enche­vê­trer dans la vie de la Com­tesse de Cas­ti­glione.  Celle-ci devient autant égé­rie que monstre avec par­fois la même lubri­cité d’apparence que les “pin-up” ciné­ma­to­gra­phiques plus tar­dives.
Néan­moins, la vie remon­tée par l’auteure n’appartient pas à l’ordre du conte pas for­cé­ment hol­ly­woo­dien même si une telle femme ne vécut que par ses propres images.

La roman­cière opère à la méta­mor­phose des fan­tasmes de celle dont elle retrace la vie plus que leur coa­gu­la­tion. Entrer dans ce livre, c’est com­prendre ce qui a pu se pas­ser chez celle qui n’a jamais cessé de se débattre avec elle-même avant de se lais­ser aller en pas­sant du paroxysme de l’idéal fan­tasmé à l’abîme.
Natha­lie Léger découpe les sil­houettes vives de la com­tesse là où l’inconscient se concentre pour per­cer sa peau à tra­vers des suc­ces­sions d’images. Elles demeurent aussi réelles que fan­tas­ma­tiques et nour­ries de rêves papillons que la rai­son crut par­fu­mer. Cette odeur n’est pas celle de la sain­teté mais de l’abandon programmé.

Le livre crée un cer­clage entre divers ordres : l’ouvert et le fermé, le cabré et l’avachi. D’où ces dif­fé­rents jeux de confron­ta­tion et de ten­sions inverses et agis­santes au sein d’une expé­rience qui tint de l’autoscopie et de l’apparition d’un moi sans nom, un moi perdu au fond de l’enfance et de la mère dis­pa­rue et jamais retrouvée.

jean-paul gavard-perret

Natha­lie Léger, L’Exposition, P.O.L édi­teur, 2020 — 9,00 €.

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