Marc Cholodenko construit son livre comme un roman photo aux éléments toujours érotiques mais tout autant diversifiés. Le tout pour de souveraines et adorables évidences qui se passent d’images. La langue dans sa sensualité les remplace dans une séries de pompes et de circonstance où séduction, voyeurisme, érotisme et pornographie se mêlent.
Le lecteur va croiser des demoiselles en talons hauts et maillots de bains (une pièce). Elles sont égratignées de noms obscènes. Mais il y a aussi des peintres (Le Lorrain, Manet, Sol LeWitt), un film de Fellini (“Les Nuits de Cabiria”), Mae West, Ophélie et pour couronner un empereur mongol qui n’a rien de mongolien même si la tête lui tourne.
Mais l’écriture ne se contente pas d’une visualisation. Elle est sonorisée par des propos tendancieux, des cancans et une cantate (de Bach). Elle s’accompagne d’une ballade irlandaise et des cris de la révolte de 68 avant que nous soyons invités à un dîner au Ritz au bras (ou presque) de la pianiste Martha Argerich.
Cholodenko s’amuse et “fait style” pour animer ses vignettes. Le texte n’adhère que partiellement aux apparences du monde qu’il évoque. L’auteur décale le motif, provoque un décrochement visuel et — en écho - vertiges et fascinations. Sont atteintes une forme de perfection littéraire et une ouverture de lignes d’inconduite avec les coups de pied de l’âne qu’accorde l’iconoclaste à ses (re)connaissances paradoxales.
jean-paul gavard-perret
Marc Cholodenko, Sarabandes, passacailles, naïades en bikini, P.O.L éditeur, Paris, 2019, 96 p., 13 E..