Claude Minière est adepte des traversées dérivantes. Le lecteur ressort régénéré de tels “transports” amoureux. En tout bien tout honneur puisqu’il s’agit ici d’une ode en prose et sans lyrisme à Pascal qui n’abandonna jamais Dieu. L’auteur ne dit pas si la réciproque est vraie. Mais c’est sans doute pour effacer ce doute dans sa tête que Pascal eut l’idée d’écrire L’Apologie de la religion chrétienne.
Le sort ou la destinée joua pour lui et en décida autrement : il n’eut pas le temps de la réaliser et ne laissa en guise et place ce qu’a dit de ses brouillons un de ses éditeurs (cité par Minière) : “tout cela était si mal écrit qu’on a eu toutes les peines du monde à les déchiffrer”.
Cela allait appeler Les Pensées, un des plus grands livres de tous les temps là où est illustrée la vanité des hommes au nom du coeur, de l’instinct et de la raison. Le texte de Minière rappelle les épisodes clés de la vie de Pascal et comment s’y fomenta ce livre majeur.
Il montre comment le scientifique rationnel a su peser “le gain et la perte, le réalisme et la témérité”.
L’auteur des Pensées fut autant capable de soigner les détails que de sauter dans le vide (?) du ciel. Et ce, en un raisonnement pour lequel les termes de bien ou mal sont obsolètes.
Mais les coups de dés sont ici bien plus forts que ceux de Mallarmé puisqu’ils abolissent le hasard.
A sa manière, le livre de Minière est à la hauteur de celui auquel il rend le plus beau des hommages sur le plan de la logique, de la foi et de l’écriture.
jean-paul gavard-perret
Claude Minière, Un coup de dés, Editions Tinbad, coll. Tinbad Essai, Paris, 2019, 56 p. — 11, 50 €.