Sur fond de mafia ancestrale, le scénario mêle des adolescents qui ne savent pas vraiment exploiter leurs pouvoirs si ce n’est pour faire des farces, un dirigeant d’une grande entreprise industrielle à l’attitude intrigante, deux policiers qui font avec les moyens du bord.
C’est avec ces ingrédients que les auteurs construisent un scénario prenant avec une forte tension jusqu’à une conclusion, qui, si elle se perçoit aisément, reste surprenante.
En 1944, quelque part en Mandchourie, un scientifique japonais fait état de l’avancement de ses expériences à un militaire car l’État-major s’impatiente. Resté seul, il est assailli par un géant enfermé dans une cage proche. Celui-ci s’empare des clés et s’apprête à fuir quand l’enfant, sur la table d’opération, l’appelle.
À Shanghai, de nos jours, dans une salle de réunion un groupe regarde les images où un robot géant arrête le char volé par deux membres de la secte du Lotus Rouge. Personne ne sait d’où vient ce robot. C’est l’agente Shao Qian qui, ayant fait zoomer sur une image, aperçoit le haut d’un visage au niveau du torse de l’engin. On revoit ce même visage, celui d’une adolescente qui se fait appeler Hashtag. Elle dispute un concours, une bataille de robots télécommandés.
L’inspecteur Wan Chen et Shao Qian sont reçus par Shansi Cao, le grand patron de la multinationale qui employait les hommes tués, qui possède l’appartement où le magicien a été retrouvé assassiné. Mais celui-ci ne veut rien dire et les renvoie sur des collaborateurs.
Sur les contreforts de l’Himalaya, au monastère du Lotus Blanc, le professeur Tsu continue de réunir les descendants des survivants aux expériences menées en Mandchourie. Mais le danger se précise quand des individus attaquent le refuge et s’emparent des mutants présents…
Plusieurs parcours mettent en scène les différents protagonistes du drame. L’un trouve son origine dans des recherches menées pendant la Seconde Guerre mondiale et qui a des retombées aujourd’hui. Maruta est le nom du programme d’expérimentation sur l’homme, dans l’unité 731 de l’armée impériale japonaise. Un autre est l’enquête classique que mènent deux policiers pour expliquer un quintuple meurtre de dealers et celui d’un magicien. Et c’est celui de ce vieil homme qui cherche à réunir, pour les protéger, des jeunes mutants et faire émerger les futurs Héros du peuple.
Le choix du cadre est novateur car placer des superhéros dans la Chine communiste avec la résurgence du Petit Livre Rouge, cette compilation des “meilleures” réflexions du Grand Timonier (sic !) est une belle idée.
Les auteurs introduisent un robot, sorte de Goldorak, qui défend des individus menacés.
C’est à Patrick Boutin-Gagné que les scénaristes ont confié le dessin. Celui-ci a déjà une belle carrière derrière lui. Cependant, avec ce diptyque, il aborde un domaine contemporain nouveau pour lui. Il mélange allègrement la BD franco-belge, le comics et le manga pour un beau résultat. Cela donne un dessin tonique, d’une belle intensité. Ses personnages sont aisément identifiables et il structure ses décors avec des détails intéressants.
Héros du peuple se révèle un superbe diptyque qui a tout pour plaire. On regrette qu’une suite ne soit pas annoncée car ces deux albums n’ont pas livré tous leurs secrets.
serge perraud
Olivier Vatine (histoire), Régis Hautière (histoire et scénario), Patrick Boutin-Gagné (dessin) & Isabelle Rabarot (couleur), Héros du peuple – t.02 : Le Dernier Maruta, Comix Buro / Éditions Glénat, coll. “Hors Collection”, juillet 2019, 56 p. – 14, 50 €.