Troisième volet des aventures de l’avocat commis d’office Christophe Leibowitz — garanti jouissif.
Leibowitz est un grand seigneur
Les plans foireux, Christophe Leibowitz, avocat de profession, il connaît. Dans ce troisième volet de ses aventures, il cohérite d’une marque de cognac et se met à rêver de grandeur et de richesse. Avocat désastreux, il se morfond dans une routine excessive qui va bientôt fêter ses vingt ans et qui est telle une pourriture grise. Que peut-il attendre de cette vie ? Sûrement pas le bonheur qui le fuit avec un malin plaisir. Alors, il ne voit qu’une solution : devenir producteur de cognac. Seulement, Leibowitz sait qu’il doit révolutionner le cognac s’il veut se démarquer. Des petits loubards, il y en a plein qui se morfondent derrière les barreaux des prisons où, malgré ses talents de commis d’office, Leibowitz les a plantés. Et ces jeunes gars connaissent le rap. Et du rap, Christophe L. veut en mettre. Alors il faut trouver un nom de marque, faire sortir un dealer-artiste de tôle et composer une ode à ce breuvage bien aimé des Américains.
Ugni soit qui mal y pense
Leibowitz aime se démener quand il s’agit de trouver des idées loufoques. Et son humour juif est toujours à l’honneur. Il appuie aussi là où le caustique fait mal et surtout, il est acide, encore plus que ses cépages. L’Amérique n’arrive pas à se sortir du traumatisme du 11 Septembre ? Qu’à cela ne tienne, en un pied-de-nez ravageur, C. Leibowitz va appeler son cognac Ground XO. Et là, comme il nous y a dorénavant habitués, tout dérape. On nage dans l’alcool, on pédale dans le brouillis. Il faut tailler dans le vif du sujet, et tout bon viticulteur vous le dira, il n’y a alors qu’une solution, la Guyot double. Après, il ne reste plus qu’à éviter d’être trop pressuré, fuir la fermentation pour s’assurer que la greffe prend bien. Alors, avec C. L. on peut s’attaquer à la distillation. Si avec son pote Diocunda Massani, il rêvait d’Amérique, c’est à Kinshasa que cette histoire en fût va vieillir. Et mal.
Appellation d’origine incontrôlée
L’AOI est signée Hannelore Cayre. C’est un gage de bon millésime. Et ce, depuis Commis d’office. Quand un premier roman est très bon, on attend le second (Toiles de maitre) au tournant. Quand le second est tout aussi bon, sinon meilleur, on piétine d’impatience car le troisième n’arrive pas assez vite. Et puis… Et puis… on se dit que peut-être Hannelore Cayre en fera un quatrième et ainsi de suite, identique et qu’on va finir par se lasser. Mais cette personne est géniale ou inconsciente ou les deux à la fois. Ground XO est un tremblement de terre pour C. Leibowitz, qui voit ses fondations s’effondrer. Et pourquoi sinon pour mettre en danger son auteure ? Alors, l’impatience prend une autre saveur. Car maintenant est espéré le premier roman sans Christophe L. Et c’est ainsi qu’on repose un grand cru.
Les allusions et certains jeux de mots douteux — Ugni soit qui mal y pense en tête — ont été créés à partir du site du Bureau interprofessionnel du cognac, un site à lire sans modération, mais pas avant d’avoir débouché un bon Ground XO.
julien vedrenne
Hannelore Cayre, Ground XO, Métailié coll. “Suite française” (vol. n° 133), septembre 2007, 144 p. — 8,00 €. |