Luminitza C. Tigirlas, Ici à nous perdre

Les ailes cassées

Lumi­nitza C. Tigir­las met en évi­dence ce qui s’engage dans la dis­pa­ri­tion de l’Amie : “Ma bouche hurle / — aphone — / sans esqui­ver le halè­te­ment de la mori­bonde. // Vapeurs de vocables / rejoignent une échelle invi­sible // A ses pieds / je m’évade par le sang d’une monade”. Puis le deuil arrive et la nuit ne s’arrête pas. Rien ne peut plus se lier et la dis­pa­ri­tion s’étend au reste de l’univers.
Pour autant, Lumi­nitza C. Tigir­las écrit comme si rien — ou presque — n’était déjà arrivé. C’est une manière de ras­sem­bler les époques et les anti­no­mies dans un tra­vail décons­truc­tion et de ravi­ne­ment remisé de manière provisoire.

Existe là l’imparable d’une dou­leur dans des ailes du désir à la fois tor­dues et déployées en un mou­ve­ment d’oppositions. La poé­tesse fait jaillir des formes issues de pro­fon­deurs. Celles de l’arrachement et du chaos et non sans un bras­sage éro­ti­que­ment impli­cite mais, dou­leur oblige, rien n’en sera dit.
Le départ oblige l’auteure à une reprise et une insis­tance là où le fémi­nin de l’être se joint à une force quasi phal­lique. La den­sité devient insis­tance de la vie contre la mort dans des souffles et expi­ra­tions  qui vou­draient dépla­cer les lignes du temps. La han­tise d’une “sui­vante” est hors de sai­son. “L’essor s’éparpille / La per­cep­tion se plie”.

Qu’ajouter ? Jamais le titre de la col­lec­tion où paraît ce livre n’aura autant mérité son nom.

jean-paul gavard-perret

Lumi­nitza C. Tigir­las, Ici à nous perdreEdi­tions du Cygne, coll. “Le chant du cygne”,  Paris, 2019, 72 p. — 12,00 €.

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