Bram Dehouck, Un été sans dormir

Une tragi-comédie jubilatoire !

La pro­vince de Flandre-Occidentale et la muni­ci­pa­lité de Wind­hoek auto­risent l’installation de dix éoliennes sur le point culmi­nant de la com­mune. Mais ce qui a été consi­déré comme un bien­fait pour le com­merce local, avec le flot de visi­teurs, va se révé­ler l’origine de drames. Tout com­mence quand Her­man Bracke, le bou­cher, célèbre pour la qua­lité de ses pro­duits et pour son fameux pâté, ne dort plus à cause du bruit des pales. Le manque de som­meil va vite se révé­ler pré­ju­di­ciable pour son acti­vité. Par contre, si le fac­teur se réjouit parce qu’elles lui rap­pellent de bons sou­ve­nirs, le vété­ri­naire se plaint des ombres cau­sées par le mou­ve­ment des pales sur son jar­din, sa fierté.
La réus­site finan­cière d’Herman, la belle voi­ture, la pis­cine, le fait que Claire, son épouse, soit vêtue d’habits neufs excite la jalou­sie de Magda, mariée à Wal­ter De Gryse. Convi­vial, sans ambi­tion, celui-ci se réa­lise dans son acti­vité.
Deux loge­ments sociaux abritent Sas­kia Maes, une jeune fille qui fuit son grand-père tyran­nique et Bien­ve­nue, un deman­deur d’asile séné­ga­lais.
Wes Bracke est un ado­les­cent grand fan de Bat­man, amou­reux de Mach­teld, la plus belle fille de la classe.
Le phar­ma­cien, le vété­ri­naire et son épouse, une vieille dame com­plètent le tableau.

Est-ce l’installation de ces éoliennes qui est le fac­teur déclen­cheur d’une série de bou­le­ver­se­ments dans ce micro­cosme vil­la­geois, en équi­libre appa­rent jusqu’alors ? Le roman­cier part du prin­cipe, pour son récit, qu’il suf­fit d’un grain de sable pour détra­quer une méca­nique appa­rem­ment bien rodée.
Il ins­talle une belle gale­rie de per­son­nages, une gale­rie bien proche de celle qu’on peut trou­ver dans les vil­lages ruraux avec quelques “notables” et toutes les failles, les mes­qui­ne­ries, les ran­cœurs, les jalou­sies, les men­songes, les non-dits, voire la médi­sance. Il ima­gine une série de faits qui peuvent paraître ano­dins, des réac­tions en chaîne qui vont mon­ter en puis­sance jusqu’à un paroxysme où tout est pos­sible, sur­tout le pire.

Le roman­cier décrit avec intel­li­gence, avec jus­tesse, les rap­ports entre les indi­vi­dus tant entre voi­sins qu’à l’intérieur des couples. Il montre l’importance de la lec­ture du jour­nal local, les opi­nions contra­dic­toires telle celle du phar­ma­cien, un atra­bi­laire qui râle contre les cas sociaux qui vivent au cro­chet du contri­buable tout en entre­te­nant la moi­tié d’un zoo. Il place son intrigue au cœur de l’été quand la cha­leur accable et rend cer­taines per­sonnes agres­sives.
L’humour est de la par­tie, un humour qui passe du plus léger au plus noir.

Avec Un été sans dor­mir, Bram Dehouck offre une tragi-comédie jubi­la­toire où il met en scène un groupe d’individus qu’il va ame­ner jusqu’à une prise de conscience pour cer­tains et jusqu’à la démence pour d’autres avec un sens très sub­til du récit.
Une bien belle découverte !

serge per­raud

Bram Dehouck, Un été sans dor­mir (Een Zomer zon­der slaap), tra­duit du néer­lan­dais (Bel­gique) par Emma­nuèle San­dron, Édi­tions 10/18, coll. “Grands détec­tives” n°5479, sep­tembre 2019, 216 p. – 7,10 €.

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Filed under Pôle noir / Thriller

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