Il existe dans ce film en costume porté (trop vite) aux nues (il est vrai que le sujet s’y prête…) : tous les poncifs du genre érotique lorsqu’il feint de s’engager un peu plus loin — on ne dira pas à fond — du côté sinon du hard-core du moins de Sade ou des romans libertins du XVIIIème qu’il singe. Tous les dispositifs du film rappellent cet univers.
Mais la mécanique des corps (parfois sanglants) n’est qu’une parodie libertine. Elle feint de s’affranchir des codes et se veut une expérience originale : elle ne fait que reprendre des lieux communs.
Certes, Serra élimine les effets théâtraux de cette fiction filmique tirée de la pièce qu’il monta pour la première fois. L’artiste a refait appel à un Helmut Berger décati et décalé pour souligner ce voyage au coeur de la nuit. Le réalisateur ne manque pas d’ambition mais son film bascule dans une plate narrativité.
Elle devient aussi flasque que les verges fatiguées à la fin de l’histoire. Elle était d’ailleurs plombée de mots par de longs monologues d’ouverture.
Bref, la radicalisation du film bascule dans un jeu de pistes prétentieux au picturalisme suranné. Ne faudrait-il pas prendre un telle oeuvre pour une gaudriole libidinale un peu scabreuse afin de sauver ce qui peut l’être, entre écurie et chaise à porteur ?
jean-paul gavard-perret
Liberté
De : Albert Serra
Avec : Helmut Berger, Marc Susini, Iliana Zabeth
Genres : Drame, Historique
Date de sortie : 4 septembre 2019
Durée : 2H12mn
Synopsis
Madame de Dumeval, le Duc de Tesis et le Duc de Wand, libertins expulsés de la cour puritaine de Louis XVI, recherchent l’appui du légendaire Duc de Walchen, séducteur et libre penseur allemand, esseulé dans un pays où règnent hypocrisie et fausse vertu. Leur mission : exporter en Allemagne le libertinage, philosophie des Lumières fondée sur le rejet de la morale et de l’autorité, mais aussi, et surtout, retrouver un lieu sûr où poursuivre leurs jeux dévoyés. Les novices du couvent voisin se laisseront-elles entraîner dans cette nuit folle où la recherche du plaisir n’obéit plus à d’autres lois que celles que dictent les désirs inassouvis ?