Un narrateur expose la sidération d’un petit groupe d’adultes quand retentissent trois coups de feu dans la quiétude d’un après-midi toscan, au cœur d’un centre équestre. Finissant par réagir, certains pénètrent dans la maison commune. C’est devant la chambre de Linda que le narrateur comprend ce qui s’est passé. Entrent alors en scène les différents acteurs, les protagonistes proches ou éloignés du drame.
Linda, une Anglaise de 39 ans, élevée dans le luxe, a vu son univers basculer avec les revers de fortune de son père. Elle entend, cependant, continuer par tous les moyens à mener la vie oisive qu’elle a toujours connue. Elle s’est mariée à James, un brillant concepteur d’algorithmes qui s’épuise à lui donner l’existence qu’elle veut.
Michael Brennan et Herbie Taylor, amis depuis quinze ans, sont dans les forces spéciales américaines en Afghanistan. C’est par accident que Michael s’est mis à échanger une correspondante avec une Anglaise. Or, Michael, s’il est un soldat robuste, n’est pas de taille pour les finesses écrites. Il a vite demandé à Herbie de l’aider à répondre à cette Linda. Celui-ci, plus subtil, s’est pris au jeu au point de faire naître, par des échanges effrénés, des sentiments très forts dans le trio.
James est très inquiet. Un contretemps retarde l’exécution de l’affaire qu’il a montée, sans éprouver de culpabilité vis-à-vis de son employeur, pour être très riche.
Linda, au centre équestre, a rencontré un Français qui, dès le premier jour, l’a regardée avec dans l’œil, une lueur qui ne trompe pas et ce, malgré la présence de son épouse et de ses enfants. C’est un banquier d’affaires dépourvu de toute morale…
Michael et Herbie sont engagés dans une mission particulièrement périlleuse pour récupérer une arme nouvelle, dévastatrice, volée en Angleterre…
Les actes et les existences des différents protagonistes s’entrecroisent, éclairant leur passé par de longs flash-backs, les circonstances qui les amenés à se rencontrer, à s’unir, à se tester ou à s’aimer. Le romancier développe, parallèlement aux événements présents consécutifs aux trois coups de feu, les faits récents qui les ont amenés à la place qu’ils occupent, dans cette situation.
Vincent Ollivier brosse des portraits détaillés de chacun, explicitant les motivations qui les animent, les liens avec leur enfance, leur jeunesse, leur situation familiale et leur catégorie sociale. Il explicite les choix plus ou moins conscients de chacun avec une connaissance peu commune de la nature humaine. Il livre des descriptions saisissantes de sentiments, d’émotions avec une belle pertinence. Il conçoit une galerie d’humains avec tout ce que cela peut comporter comme sentiments nobles mais aussi comme lâchetés, comme mensonges, comme ignominies. Il ne fait pas dans le glamour mais laisse percer des émotions de midinettes qui peuvent toucher n’importe qui, n’importe quand. L’argent joue un grand rôle dans cette histoire passionnante du début à la fin.
Le cheval occupe également une place importante dans le récit avec les sensations qu’il suscite, les liens que l’humain peut entretenir avec ce magnifique animal. L’amour n’est pas oublié, tant l’amour sentimental que physique, l’auteur ne voulant pas occulter une des principales occupations du mâle : pouvoir forniquer avec une femelle. La femelle, quant à elle, a le souci de savoir si sa séduction est toujours intacte.
L’intrigue s’installe subtilement, se révèle au fur et à mesure que le récit éclaire le passé de chacun, les attaches qui peuvent unir tout ce petit monde. En effet, si ceux-ci sont au centre du récit, ce n’est pas, à part quelques personnages secondaires, pour faire de la figuration. Le romancier articule une série de faits, d’actes qui se mélangent, qui finissent par s’entremêler pour un final remarquable.
Avec un goût de l’image qui frappe, de l’idée qui fait mouche, avec des dialogues savoureux servis par une écriture fluide, Vincent Ollivier tient son lecteur en haleine jusqu’au bout de son roman et offre un très bon moment de lecture.
serge perraud
Vincent Ollivier, Toscane, J’ai Lu, coll. “Thriller” n° 12413, juin 2019, 416 p. – 8,00 €.