Danielle Thiéry, Crimes de Seine

Une nou­velle enquête de la com­mis­saire Marion, sans elle…

La com­mis­saire divi­sion­naire Edwige Marion dirige la Bri­gade des che­mins de fer de la gare du Nord. Elle a rendez-vous avec un indic, un rendez-vous qui met tous ses signaux en rouge. Dans le poste d’aiguillage désaf­fecté, elle prend une balle dans la tête. Le drame fait l’effet d’un tsu­nami dans la Bri­gade quand il est décou­vert.
Depuis quinze jours il pleut et les per­tur­ba­tions se ren­forcent. Anne Morin, pré­fète, dirige les opé­ra­tions depuis le PC de crise de la zone de défense de Paris.
Valen­tine Cara et Luc Aba­die se pré­ci­pitent, buttent dans l’adjoint de Marion, le com­mis­saire Amaury Guerry des Croix du Mar­te­roy appelé Guerry– etc. Sur les lieux, le méde­cin du SAMU com­mu­nique son diag­nos­tic, une Glas­gow 3, un coma très pro­fond. Marion est emme­née à la Pitié-Salpêtrière.
Valen­tine veut voir la scène mal­gré l’hostilité de l’OPJ de la Crim. Elle est cho­quée par la sil­houette du corps de Marion, exa­mine le cadavre qui est resté dans le local et remarque, dans sa main repliée, un éclat blanc. Subrep­ti­ce­ment, elle s’en empare contre toutes les règles de déontologie.

La situa­tion empire dans Paris menacé par une crue d’une ampleur excep­tion­nelle. À la Pitié-Salpêtrière qu’il faut éva­cuer, le sort de Marion, compte tenu de son état très grave n’est pas une prio­rité mal­gré l’insistance de Pierre Mohica, son com­pa­gnon, par ailleurs méde­cin ORL. Valen­tine a reconnu, bien qu’elle affirme le contraire au com­man­dant avec qui elle a par­tagé sa vie il y a quelques années, le cadavre dans le poste d’aiguillage.
La crue s’amplifie, désor­ga­ni­sant pra­ti­que­ment tous les ser­vices publics et pri­vés. Et dans ce contexte, le corps de Marion dis­pa­raît… Et, sous la pous­sée des eaux, plu­sieurs corps, momi­fiés récem­ment, sortent d’une salle sou­ter­raine du musée de l’Homme…

Edwige Marion est bien en peine de mener l’enquête la concer­nant. Ce sont ses proches, ceux de sa “famille” qui s’activent dans des condi­tions ren­dues fort dif­fi­ciles par les condi­tions cli­ma­tiques et le stress lié à l’incertitude quant à sa sur­vie. Les évé­ne­ments se mul­ti­plient à un rythme très sou­tenu tou­chant direc­te­ment ou indi­rec­te­ment les prin­ci­paux pro­ta­go­nistes du drame.
La roman­cière met en œuvre plu­sieurs intrigues autour de deux axes prin­ci­paux, celui qui découle de la ten­ta­tive d’assassinat sur la com­mis­saire et celui qui menace la capi­tale entraî­nant des dif­fi­cul­tés telles que des pro­cé­dures, des actions ne peuvent être menées dans les règles, géné­rant des situa­tions de crise sup­plé­men­taires. Elle brosse avec pré­ci­sion, d’une façon très docu­men­tée, tout ce qu’implique cette crue, les actions à mener pour contrer une telle catas­trophe et en mini­mi­ser les effets, les dom­mages. Elle montre tous les sec­teurs concer­nés, même cer­tains dont on pour­rait pen­ser qu’ils en sont bien éloi­gnés, le tra­vail sur le ter­rain mené par des cen­taines de per­sonnes lut­tant pied à pied contre les eaux. Régu­liè­re­ment, dans l’histoire, des crues légen­daires ont ravagé la région pari­sienne. La der­nière, d’une telle ampleur, s’est dérou­lée en 1910. Avec en toile de fond cette crue cen­ten­nale qui menace toute la région pari­sienne, Thiéry  pro­pose un magni­fique récit.

Elle décrit avec à-propos et finesse les rap­ports entre les membres d’un groupe, les liens qui se tissent consciem­ment ou incons­ciem­ment pour peu que le groupe soit soudé autour d’un noyau cha­ris­ma­tique. Elle fait une belle ana­lyse des com­por­te­ments quand les règles sociales changent ou sont mena­cées, fai­sant dire par ses per­son­nages quelques pro­pos peu amènes sur la Crim : “…elle est fou­tue. Bras armé de la magis­tra­ture selon cer­tains, lar­bin des juges pour d’autres. Bouf­fée impi­toya­ble­ment par les gen­darmes…“
La roman­cière bro­carde les ser­vices de l’État et leur ver­ti­ca­lité, la bureau­cra­tie et sa pro­fu­sion de rap­ports, esti­mant que la pré­sente enquête aurait pu géné­rer une pile de docu­ments de deux mètres de hau­teur. Fort de cette décla­ra­tion, Danielle Thiéry offre une conclu­sion sous forme d’une suite de ces dits rap­ports qu’elle moque. Mais ceux-ci, du fait de l’auteure, éclairent par­fai­te­ment une sombre affaire aux rami­fi­ca­tions insoupçonnables.

Avec Crimes de Seine, Danielle Thiéry signe une belle réus­site romanesque.

serge per­raud

Danielle Thiéry, Crimes de Seine, J’ai Lu, coll. “Thril­ler” n° 12133, mai 2019, 512 p. – 8,20 €.

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Filed under Pôle noir / Thriller

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