Que faire pour ne pas être mangé ?
À la fin du cycle précédent, pendant l’éruption du volcan, Gargouille, le bébé de Justine et Gérard, est parti en compagnie de Léonard pour le XXIe siècle. Ils se retrouvent dans l’orphelinat. Tout est nouveau pour eux, la façon de se conduire, de se nourrir, de se vêtir…
Sur le tronc d’arbre où la tribu a trouvé refuge, ils dérivent sur le fleuve sans savoir où ils vont. Ils ont emmené Pepperoni qui était dans la caverne et a reçu une pierre sur la tête. Tout le monde est persuadé que Franck a abandonné le bébé et Léonard. Il a beau expliquer que s’il est ressorti seul, c’est parce qu’ils sont partis pour l’époque d’où il vient. Personne ne maîtrise les concepts pour croire une telle histoire.
Ils sont soudain attaqués par un monstre qui met tout le monde à l’eau. Alors qu’au terme d’une bataille dantesque, tous sont éjectés sur la rive par les soubresauts du monstre à l’agonie, Franck, qui ne sait pas nager, a coulé. Il reprend connaissance grâce aux soins d’un adulte qui lui ressemble et qui veut lui donner trois instructions capitales… Celui-ci disparaît et Franck, qui ne peut rejoindre la rive en face est capturé, avec Pepperoni, par des cannibales…
En lâchant un adolescent d’aujourd’hui dans une Préhistoire qui reste à inventer, l’idée de base de cette série est particulièrement intéressante et innovante. En effet, si l’on peut appréhender le mode vie des très anciens ancêtres dans les grandes lignes, le quotidien reste sujet à supputations, à hypothèses. Il fallait donc créer un existant et le faire découvrir à cet adolescent qui avait perdu tous ses repères.
On pouvait craindre toutefois que le récit s’épuise, se délaie, que les auteurs arrivent vite au bout du possible. Or, il n’en n’est rien ! Au contraire, après un premier cycle où les aventures de jeune Franck furent aussi nombreuses que ses découvertes, les auteurs entament une suite toujours aussi imaginative, fertile en rebondissements de toutes natures, boostée par la mise en œuvre de décalages entre le vécu des deux époques et par un humour omniprésent.
Olivier Bocquet introduit sans cesse de nouveaux éléments d’intrigue, jouant également sur le voyage dans le temps. Brice Cossu met en images une Préhistoire aux décors fabuleux, avec une faune, inspirée des meilleures sources, et une flore surabondante. Les actions, très nombreuses, sont relayées par un dessin dynamique, d’une grande précision.
Les fuites, les combats sont l’occasion de démontrer tout l’énergie induite. Il suffit, pour s’en convaincre, de voir les quelques pages de la bataille contre le monstre aquatique. Les populations d’autochtones sont formidablement campées et d’une belle expressivité.
Ce dessin est valorisé par la mise en couleurs de Yoann Guillo qui excelle à définir des atmosphères propres à chaque situation.
Un beau départ pour un nouveau cycle qui sera, à n’en pas douter, tout aussi séduisant que le premier.
serge perraud
Olivier Bocquet (scénario), Brice Cossu (dessin) & Yoann Guillo (couleurs), FRNCK – t.05 : Cannibales, Dupuis, juin 2019, 64 p. – 10, 95 €.