Roland Sénéca, Créatures

L’être en per­pé­tuel chantier

Les corps de Sénéca sont des sur­faces dont la viande devient un étrange fruit. A l’intérieur, le coeur y infuse sans doute dans la tor­sion des désirs et de mul­tiples tour­ments. Mais dans les des­sins et les textes qui les accom­pagnent, tout devient ici rêve­rie (enfin presque).
Les traces demeurent aussi cor­po­relles qu’essentialistes en des sortes de pampres, lunes flammes et feuillages. Ce qui res­tait jusque là à l’abri des ventres trouve sou­dain une chambre d’écho et sort des starting-blocks de la peau.

Enca­dré de traits noirs les corps sont de ces mosaïques si per­sua­sives que para­doxa­le­ment et au pre­mier abord on ne voit rien. Mais très vite l’attention est éveillée, on voit que tout pos­sède un sens : un gra­cieux colon à noueux papillon, une sorte de casque à enlu­mi­nure témoignent de bien autre chose que d’un simple talent.

Certes, peu de mufles hilares mais tout témoigne d’une maî­trise dans la façon de trans­crire le corps par d’autres voies qu’une nou­velle “ronde de nuit” ou qu’un “Saint Fran­çois rece­vant les stig­mates”.
Sénéca mérite donc bien sa répu­ta­tion d’animalier adroit de l’humain. Et c’est une occa­sion pour l’être de se confron­ter avec des visions qui le dévissent de son pie­des­tal. Il est sou­dain moins enchanté qu’en per­pé­tuel chantier.

jean-paul gavard-perret

Roland Sénéca, Créa­tures, Fata Mor­gana Edi­tions, Font­froide le haut, 2019, 104 p.

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