Dans ce livre, chaque piqûre est une concordance des taons que Jacqueline Fischer anime. Aux carrés de textile créés par la poétesse répond un texte. S’il en est l’écho, il se refuse à toute harmonie imitative. Mais, chaque fois, l’émotion créée par le textile est renforcée par l’intelligence du texte.
Il est vrai que Jacqueline Fischer est une lettrée espiègle, faite pour les sauts et gambades. La proximité de la Belgique où les rêves littéraires les plus fous sont de mise transforme la nordique en créatrice libre et libertaire qui aime l’écru pour se tendresse rude mais qui, pour autant, ose la délicatesse des pastourelles afin que les épanchements deviennent la nef des souffles. Ils résistent dans la torsion des voiles qui se gonflent et qu’importent leurs déchirures.
Ici, l’imagination avance. Elle s’empare du textile. Il quitte sa nature première et devient image pour l’anaphore et l’entrechat subtil. Le lubrique n’est que suggéré, la souffrance est à peine plus marquée. C’est le moyen pour “l’experte en dessous de table” de multiplier les ruses.
Elle dissimule ce qui fait trop mal et laisse visible ce qui transfigure les clôtures. Si bien que chaque pièce de tissu ou de texte répand une plénitude.
jean-paul gavard-perret
Jacqueline Fischer, Touches, Textpatch, 2019. (Commande à chiffondart@aol.com)