L’Empire vit ses dernières heures, et Joseph Bonaparte charge Quentin Margont d’une enquête bien spéciale.
Mars 1814, les grandes victoires napoléoniennes sont loin. La France se bat sur son propre territoire pour la première fois depuis très longtemps, et la coalition alliée est aux portes de Paris. L’Empereur signe des victoires de prestige mais l’inéluctable semble se préciser. La Grande Armée est amoindrie, et les héros sont fatigués. Paris vit les dernières heures de l’Empire. Les groupes monarchistes se réveillent. Car chacun veut se rappeler au bon souvenir des Bourbons et du futur Louis XVIII. Parmi ces groupes, un en particulier fait parler de lui : les Épées du Roi. Et de la manière la plus sordide qui soit. Un colonel, responsable des défenses de la Capitale, est retrouvé assassiné, le visage brûlé, un emblème des Épées du Roi à ses côtés. Quentin Margont, rattaché à la Garde nationale de Paris, après la promotion au rang de Colonel de son ami Saber, est chargé par Joseph Bonaparte et Talleyrand, de découvrir le criminel et d’infiltrer les Épées du Roi.
Accompagné du sergent Fernand Lefine mais aussi du docteur Jean-Quenin Brémond, deux inséparables amis de Margont, braves parmi les braves et qui ont échappé à toutes les balles, qu’elles aient été russes, prussiennes, autrichiennes ou anglaises, notre enquêteur va devoir trouver parmi les dirigeants des Épées du Roi qui est le criminel. Deuxième tâche non moins ardue, découvrir la cachette du comte Kevlokine, émissaire et ami du Tsar qui se trouve dans la Capitale. En effet, si Napoléon pouvait entamer des négociations avec la Russie, les forces alliées en sortiraient amoindries (c’est pourquoi chaque émissaire français est accueilli par des représentants de chaque nation de la coalition). Margont est convaincu que Catherine de Saltonges, la seule femme dirigeante des Épées du Roi, est au cœur du problème. Cette femme a ses propres secrets et semble détenir certains de ceux des autres. L’assassin est forcément l’un de ces quatre hommes : le traître et joueur invétéré Charles de Varencourt, Louis de Leaume, l’aristocrate de vieille souche, l’insondable Honoré de Nolant ou Jean-Baptiste de Châtel, un catholique enragé. Et Margont est convaincu que cet assassin est aussi l’amant de Catherine de Saltonges. Quelqu’un qui a déjà beaucoup souffert et que rien ne semble pouvoir ramener sur les chemins de la rédemption. Pendant ce temps, un étrange poison, le curare, fait son apparition. Quentin Margont découvrira-t-il le coupable avant la chute de l’Empereur ?
Membre du Souvenir napoléonien, Armand Cabasson signe un troisième volet très intéressant. Car à part Chasse au loup (récompensé en 2005 par le Prix du livre de fiction de la Fondation Napoléon) qui se déroulait du côté d’Aspern en 1809 dans les glorieuses années des victoires incessantes, Les Proies de l’officier et La Mémoire des flammes s’attardent sur les périodes de défaites (le prochain se déroulera-t-il à Waterloo ?) Il aurait été très simple, en effet, de poser sa trame à Austerlitz, à Iéna, à Marengo… Là, le résultat n’en est que plus flagrant. La mayonnaise prend bien. Très bien. Les personnages sont bien étoffés. Si Quentin Margont tient la primeur — en sa qualité de héros — Lefine, Saber et Bremond restent aussi attachants. Armand Cabasson se joue, d’une certaine manière, du temps — on est passé de 1812 à 1809 pour aller en 1814 — mais pas de l’Histoire qui, elle, en trois épisodes, n’est absolument pas martyrisée. On découvre les personnalités du XIXe siècle, ainsi le Diable boiteux, ce satané Talleyrand, être froid, calculateur, rusé et sans états d’âme qui n’hésitera pas à sacrifier Margont sur le bûcher de ses ambitions personnelles. Vivement le quatrième épisode…
julien védrenne
Armand Cabasson, La Mémoire des flammes, 10–18 coll. “Grands détectives” (n° 3883), mars 2006, 426 p. — 7,30 €. |