Jacques Cauda, Le Cafard Hérétique. Hors série — 3

Quand le cafard ignore le blues

Jacques Cauda  pro­longe ses amours de Swann (enten­dons de cygne) en rudi­ment de congre. Il ne rumine pas et n’est jamais avare de ses ver­tiges en deve­nant l’ordonnateur de ce numéro spé­cial de la revue qui lui est consa­cré et où opèrent à corps ouverts des écri­vains de plu­sieurs for­mats et de diverses espèces.

Il y a là des insectes ram­pants mais ailés (Thi­bault Mar­thou­ret), des puce­rons des lits réser­vés aux  amours illi­cites (Yan Kou­ton), des mantes (plus amantes des liber­tés que reli­gieuses empe­sées du plas­tron (Per­rine Le Quer­rec, Angèle Casa­nova, Vanessa Kientz)) ou encore un Bruno Lus qui vou­drait se faire pas­ser pour escar­got volage et coquet et quelques autres moi­neaux à la plume lit­té­raire plus ou moins longue et à la queue aux mêmes dimensions.

Quand à Cauda lui-même : il se tait. Ce qui est presque un comble. Il n’est pas néan­moins enfermé dans la cage du numéro ou retiré dans ses combles. Il se livre à d’autres célé­bra­tions et s’y veut plus phy­sique que men­tal. Quoique jovial, il est moins ham­ster des dames que pois­son rouge (la cou­leur mère du pro­fa­na­teur) dans le bocal du buf­fet d’où il regarde ses accom­pa­gna­teurs s’époumoner en son nom dans ce bes­tiaire.
Ne croyez pas pour autant que les forces de Cauda soient épui­sées : son empire est au rendez-vous. Il fait la conver­sa­tion par ses des­sins et pein­tures aux espé­rés scrip­teurs qui nour­rissent de leurs textes ses fan­tasmes ani­ma­liers et provocateurs.

On s’en serait douté : sa mouche tache. Est-ce pour autant un auto­por­trait ? Mais, par ses images, il devient plus un cri­tique ver­té­bré type Canard déchaîné qu’analyste à la Sainte-Beuverie. Ses oeuvres n’ont rien de cor­se­tées : les chiens miaulent, les chats hurlent, et les images deviennent des corps étran­gers sinon au natu­ra­lisme exa­cerbé.
Tout sent la bam­boche plus que la ména­ge­rie chez le gra­pho­mane scan­da­leux. L’animal rit même lorsqu’il est semble s’accorder à une colère bête donc quasi humaine. Les errances sont cin­glantes, les ani­maux sou­vent riches en griffes et autres ins­tru­ments sont — à l’inverse de l’homme — moins avides d’abîme que de survivance.

Mais que les affi­cio­na­dos de Cauda se ras­surent : il existe au milieu des che­nils et volières un “aimant hyp­no­tique” (autre auto­por­trait pas contu­mace ?) et une égé­rie cau­dienne. A savoir une  coquine aux cuisses (de mouche) qui — avant de tapi­ner sur les quais de Paris - elsa trio­lette en se pen­chant à sa fenêtre.
Ce qui était jadis inter­dit par la SNCF. Mais Cauda n’en a cure de chas­teté. Il flambe comme un jeune lièvre  face à des lignes qui, quoique non fer­ro­viaires, mènent à bon port de reine des prés.

jean-paul gavard-perret

Jacques Cauda. Le Cafard Héré­tique. Hors série — 3, Luna­tique, Vitré, 2019, 140 p. — 15, 00 €.

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