Marc Pautrel, L’éternel printemps (Rentrée littéraire 2019)

Un bon “coup”

Marc Pau­trel fait de cha­cun de ses livres un manuel iro­nique de sur­vie. L’éternel prin­temps ne déroge pas à la règle. Il est vrai que son nar­ra­teur a le goût bon et judi­cieux : « J’avais vu juste, elle n’a per­sonne dans sa vie actuel­le­ment. De son côté, elle sait que je suis séparé. Elle a été mariée, a divorcé, n’a pas d’enfants. Elle sort peu, mais elle aime aller au res­tau­rant. Par­ler sans fin en man­geant est éga­le­ment un de mes grands plai­sirs.»
Dès lors, le domaine de l’amour n’est pas for­cé­ment celui de la lutte lorsque la carte de res­tau­rant peut ser­vir de ter­ri­toire du Tendre (steak compris).

La vie appar­tient à ceux qui de nou­veau semblent décou­vrir une route tra­cée pour eux au moment où les ava­nies du passé paraissent s’aplanir. Appa­rem­ment et le plus confor­ta­ble­ment, il est non seule­ment licite mais loi­sible de par­ler, ima­gi­ner, se sou­ve­nir, inven­ter une nou­velle vie et échan­ger.
Néan­moins, dans le jar­din d’Eden dont les allées sont pavées de bonnes inten­tions, il y a encore des risques de tempête.

De leur pou­voir consti­tuant appa­raît tou­te­fois un éter­nel pré­sent. Tout pour­rait donc deve­nir contrô­lable. Mais c’est oublier qu’il n’existe  plus de sai­sons. Les cur­seurs bougent et retournent cer­taines actions qui se vou­draient effi­caces dans la sphère de l’intimité.
D’autant que le nar­ra­teur — à l’inverse du jeune Pas­cal dont l’auteur remonta l’existence dans un de ses der­nier livres — ne se contente pas de regar­der la grande roue tour­ner et don­ner un sens à l’eau.

Il a l’impression (plus bau­de­lai­rienne) d’être la plaie et le cou­teau, même s’il se croit fait pour une iné­luc­table union dont il serait l’artisan et l’outil. Mais il existe  loin de la coupe aux lèvres.
Parce que la ques­tion de l’amour demeure immense et que, tou­jours, il vou­dra décou­vrir le lieu où vont se cacher les sen­ti­ments et leurs torsions.

jean-paul gavard-perret

Marc Pau­trel, L’éternel prin­temps,  Gal­li­mard, coll. L’Infini, 2019.

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