René Fregni et la conscience du monde
Ecrivain des vies déclassées ou perdues, toujours adepte d’un certain mystère qui le fit reléguer longtemps du côté de la littérature populaire et policière, René Fregni n’en néglige pas l’intérêt que son écriture peut en tirer. Sortant de ses paradigmes premiers, l’auteur choisit comme narrateur un homme qui vit à dessein de petits boulots. Ce héros trouve dans cette existence le temps d’écrire sans souci d’une économie de le rentabilité.
Plutôt que de se plonger dans une structure sociale et d’y participer, et grâce à un ami, le personnage s’enferme volontairement en devenant gardien d’un monastère inhabité, niché dans les collines.
Afin de “dialoguer”, un chat nommé Solex fait l’affaire. Tout semble bien se passer jusqu’à ce que le narrateur lors d’un jardinage de routine déterre une jambe humaine dont l’état prouve que son enfouissement est des plus récents. Mais quand le narrateur accompagne les gendarmes sur le lieu de sa découverte, la jambe a disparu.
Bien sûr, des stéréotypes poussent à présenter comme criminels potentiels les “mal vus” d’une altérité “classiquement” soupçonnable.
Néanmoins, l’enquête en ses progrès passe par des chemins de traverse. Et les vérités le sont autant. L’occasion est belle pour Frégni d’évoquer un monde naturel sauvage d’une Provence cosmique qu’ignorent les touristes. Dans une libre modélisation a priori morbide surgissent le mystère et la sensualité d’un pays qu’à la fois l’intrigue et surtout l’écriture animent.
Rien d’inerte : tout est actif et possède une capacité d’action jusqu’au dénouement final au sein de l’énergie de la nature, qu’elle soit bienveillante ou non.
jean-paul gavard-perret
René Frégni, Derniers arrêts avant l’automne, Gallimard, coll. Blanche, Paris, 2019.
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