Sortant du cinéma, Daney se fit lyrique pour signifier l’intérêt du tennis. Ce sport est pourtant des plus ridicules puisque les adversaires se contentent de se passer la balle disait avec justesse un humoriste. L’auteur fait néanmoins croire que Borg mit cette balle où elle n’était pas attendue et Mac Enroe où elle n’irait théoriquement jamais.
Bref, le texte parle de la présence mystérieuse des trajectoires, leur fluide, onde, ondulation dans l’emprise de l’air et la puissance des coups.
Daney nous fait croire que ce sport est plus un exercice intelligent qu’une cure d’idiotie. Ses idoles s’y livrent laborieusement, méthodiquement, quotidiennement, comme à une science : descendre en soi, faire le vide, chercher à en savoir plus sur les manies et tics des animaux machines qui font face.
L’auteur dresse la liste de celles et ceux qui firent vibrer les aficionados. Il semblait dans de de tels articles de circonstances vouloir quitter la langue pour passer aux actes des enchanteurs de la raquette.
Mais il reste moins théoricien éclairé qu’écrivain pratiquant. Toutefois, l’usage du langage vise ici une sorte d’artefact : celui de l’espace scénique qu’est le court de tennis. L’auteur fait de ses acteurs ses héros mais peuvent-ils incarner de véritables mythes ?
Il fit feinte d’y croire. Mais il convaincra peu ceux qui — comme l’auteur de ses lignes — restent totalement étrangers à un tel ramdam.
jean-paul gavard-perret
Serge Daney, L’amateur de Tennis, P.O.L, réédition, 2019, 384 p.