Sur les pas d’une privée opiniâtre…
Dans son second roman publié, (Après Boccanera - L’aube– 2018), la romancière appuie son intrigue principale sur une actualité brûlante, sur toutes des questions que posent l’immigration que celle-ci soit imposée par des situations de guerre et/ou liée à des conditions économiques désastreuses. Elle croise cette intrigue principale avec nombre de récits parallèles, tissant une toile pleine de vie, fourmillante de détails sur des personnages, des événements, des actes plus ou moins nobles, plus ou moins gratuits où elle fait entrer une belle et délicieuse part d’humanité.
Une humanité qu’elle dissimule, toutefois, sous une couche d’humour car elle excelle dans cet exercice, trouver, pointer le côté cocasse de nombre de situations, de dialogues. Elle sait, à merveille, faire baisser la tension de son récit par une jolie pirouette, un trait humoristique.
Ghjulia Boccanera, dite Diou, est enquêtrice privée à Nice. Parce qu’elle a accepté de garder Scorsese, le chien de ses amies suédoises parties en vacances dans leur pays, elle est contrainte d’aller le sortir. Celui-ci la réveille, depuis trois semaines, entre 6 heures et 6 heures 03. C’est sur le mont Boron qu’elle va le promener. Or, ce matin-là, il échappe à sa surveillance. Elle le retrouve, en contrebas du sentier, devant le cadavre d’un jeune noir. D’après ses premières constations, il a été passé à tabac. Elle téléphone immédiatement à Jo Santucci, son ex, commandant de police.
Alors qu’elle rentre après que son ex lui ait intimé de ne pas s’occuper de cette affaire, elle est appelée par Colette, la patronne de son restaurant préféré. Celle-ci la contacte pour une amie dont la fille, Melody, une adolescente, a disparu depuis quatre jours. Pour suivre les conseils pressants de son ex, Ghjulia décide de s’occuper de cette affaire. Elle commence à interroger sa famille, ses amis et relations. Très vite elle se trouve orientée vers des milieux extrémistes, vers ceux qui refusent toute immigration, qui veulent la combattre. Et elle a à faire à forte partie ! Sa sécurité est vite mise en danger…
Avec Diou, Michèle Pedinielli a créé un personnage intelligent de femme libre, rebelle à toutes contraintes, opiniâtre, n’ayant pas toujours conscience du danger, ce qui la place dans des situations difficiles, qui aime le sexe, n’hésitant pas à le dire. Elle entoure son attachante héroïne d’une galerie de protagonistes d’une belle diversité, du SDF aux “élites”, ayant cependant une propension à mettre en scène des gens du peuple.
Dans son premier roman, elle avait fait de la ville de Nice un véritable personnage, celle-ci se combinant avec la traque de criminels. Elle réédite, offrant un véritable circuit touristique guidé, donnant de cette ville la dimension d’un décor presque féerique.
Parallèlement, elle donne le récit, par un jeune garçon, des passages de frontière entre la France occupée et l’Italie en 1943. Il s’agissait, alors, de fuir un pays où la traque était sévère pour gagner un lieu moins dangereux. Elle fait, ainsi, le rapprochement entre les deux époques où on retrouve, dans les mêmes circonstances, des migrants fuyant un danger, à la recherche d’une terre promise.
Révélée de belle manière avec Boccanera, Michèle Pedinielli récidive avec cet excellent roman à l’intrigue très actuelle, avec une héroïne très empathique, au ton humoristique soutenu. L’assurance d’un très bon moment de lecture !
serge perraud
Michèle Pedinielli, Après les chiens, L’aube, coll. “Noire”, mai 2019, 256 p. – 17,90 €.