Pedro Almodovar, Douleur & Gloire

Dans la gra­vité et l’exubérance

Almo­do­var reste un baroque excen­trique capable de tout. De faire rire et, comme ici, d’émouvoir dans un film tra­gique sans doute tes­ta­men­taire. Comme pour cha­cun de ses films le génial Ibère  semble en faire trop et pour­tant cela n’altère en rien la vision  du mélo­drame à sa façon. La réa­lité devient ici  un rêve dou­lou­reux où la pré­sence de la mère est subli­mée par son artiste fétiche (Pene­lope Cruz).
L’histoire est celle d’un réa­li­sa­teur très célèbre en mal d’inspiration suite, entre autres, à la mort de sa mère enter­rée en veuve et les pieds non atta­chés pour qu’elle puisse s’envoler. Almo­do­var n’est pas loin de son per­son­nage incarné par Anto­nio Ban­de­ras. Néan­moins, les sen­ti­ments expri­més touchent à l’universel. Et la gran­deur du film touche à sa pro­fon­deur de regard qui ramène une fois de plus à l’enfance.

Il existe là une dou­ceur de regard envers son per­son­nage cen­tral. Dif­fé­rents axes nar­ra­tifs se mélangent et peuvent dérou­ter mais sans cesse sont habi­le­ment noués et sans que les flash-backs ne gênent une linéa­rité volon­taire et intense là où le film échappe au nar­cis­sisme qui pou­vait l’inspirer. Cou­leurs, cos­tumes, décors jouent d’une volon­taire “lai­deur” rococo et arti­fi­cielle. Elle s’oppose à l’aspect trans­pa­rent et perdu du per­son­nage cen­tral malade et en bout de route.
Certes, les femmes sont réduites aux rôles de béquilles pour les mâles mais néan­moins elles ins­tallent un temps mélan­co­lique voire angois­sant là où tout, para­doxa­le­ment, est bariolé.

Le réa­li­sa­teur, dans cette parade de per­son­nages, regarde moins son passé qu’il s’installe dans le pré­sent avec élé­gance, pudeur et dans du fil­mique au sens plein du terme dans la gra­vité et l’exubérance.
Le film, comme sou­vent chez le réa­li­sa­teur, se ter­mine en apo­théose. La der­nière phrase est clouante.

jean-paul gavard-perret


Dou­leur et gloire

De : Pedro Almodó­var
Avec : Anto­nio Ban­de­ras, Asier Etxean­dia, Leo­nardo Sba­ra­glia
Genre : Drame
Date de sor­tie : 17 mai 2019
Durée : 1H52mn

Synop­sis

Une série de retrou­vailles après plu­sieurs décen­nies, cer­taines en chair et en os, d’autres par le sou­ve­nir, dans la vie d’un réa­li­sa­teur en souf­france. Pre­mières amours, les sui­vantes, la mère, la mort, des acteurs avec qui il a tra­vaillé, les années 60, les années 80 et le pré­sent. L’impossibilité de sépa­rer créa­tion et vie pri­vée. Et le vide, l’insondable vide face à l’incapacité de conti­nuer à tourner.

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