Jacques Réda & Philippe Hélénon, Éloge du champignon

Au fond des bois

En rôdeurs des four­rés, Jacques Réda et Phi­lippe Hélé­non arpentent les bois. Après la Bour­gogne viti­cole (Le ver­sant avare), les bureaux de tabacs du ving­tième arron­dis­se­ment (Tabacs d’Orient), l’encyclopédique phy­si­cien Jacques Réda vient se frot­ter aux cham­pi­gnons. Phi­lippe Hélé­non, lui-même ath­lète en “spores” et com­plice de l’auteur, les trans­forme en s’en moquant quelque peu.
L’ensemble offre une fête gra­phique et ver­bale dans des étreintes du presque rien qui, par sur­prise, devient un petit quelque chose tout au fond des bois.

Ce qui tient de l’épave végé­tale déli­cieuse ou mor­telle  per­met de tenir le monde dans un panier où se recueille ce qui est arra­ché à la terre humide et sombre lorsqu’elle est préa­la­ble­ment saluée par des pluies errantes. Reda s’y fait rôdeur dans l’aube où se ren­contre l’univers par un de ses rébus. Ce monde, Réda le rythme.
Sans jamais choi­sir un seul che­min, il file à tra­vers bois à la recherche des lobes petits ou énormes, blancs ou gris avant d’aller sif­fler sur les collines.

Avec les cham­pi­gnons, Hélé­non et son alter ego des­cendent pro­fond dans la matière char­nue qu’un Opi­nel arrache à la terre. Pous­sés de la ville vers la péri­phé­ries et les cam­pagnes, ils arpentent des ravins.
Certes, ils ne sont pas seuls : “En automne, Lisette allait aux cham­pi­gnons, /Par pru­dence, tou­jours avec deux com­pa­gnons. /Un seul sans doute aurait bous­culé son chi­gnon. /Mais d’un autre, il pou­vait redou­ter quelque gnon.”

Comme elle — ou en étant ses rois mages - ils vont. À chaque pas ou presque se découvrent  des lunes où se cachent les rosés des prés.  Sous les châ­tai­gniers, des chan­te­relles et des trom­pettes de la mort pro­posent un jazz silen­cieux.
C’est alors qu’il fait bon mar­cher avec du tabac dans la poche tan­dis que le soleil rame bas pour lais­ser tout le champ libre à sa lumière et aux orpailleurs.

jean-paul gavard-perret

Jacques Réda &Phi­lippe Hélé­non, Éloge du cham­pi­gnon, Fata Mor­gana, Font­froide le Haut, 2019, 32 p. — 10,00 €.

1 Comment

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One Response to Jacques Réda & Philippe Hélénon, Éloge du champignon

  1. Jeanne

    Oh! je sens leur par­fum et ma main caresse leur peau douce! Balade très ten­tante Opi­nel en poche et bâton à la main, déga­ger quelques feuilles sèches et décou­vrir un “rond” de trom­pettes ou de pieds de mou­ton! Allons-y!

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