Ce livre n’est pas à mettre entre toutes les mains. C’est un véritable plongeon dans un monde noir, où des enfants meurent pour pas grand-chose.
1974 est le premier volet de Red Riding Quartet, une tétralogie dont les autres titres ont aussi des noms d’années espacées de trois en trois : 1977, 1980 et 1983. À l’occasion de la sortie du troisième volume, inédit en France, dans la collection Thriller, les éditions Rivages sortent au format poche 1974.
Dans la lignée d’un Robin Cook ou d’un James Ellroy — de l’aveu même de l’éditeur -, David Peace dépeint un Yorkshire comme on n’en rêve pas. Noël 1974 approche à grands pas. Clare Kemplay, une fillette de 10 ans, disparaît pour mieux réapparaître, morte, dans une tranchée sur un chantier. Nue et des ailes de pigeon cousues dans le dos. Edward Dunford, tout jeune reporter pour l’Evening Post, couvre l’enquête alors même qu’il enterre son père. Il fait face au chef de police local qui ne veut pas voir de liens entre ce crime et d’autres disparitions d’enfants survenues les années précédentes.
Un autre journaliste, Barry Gannon, souvent ivre, enquête quant à lui sur des scandales immobiliers. Il meurt dans un accident de voiture pour le moins surprenant. Il avait, néanmoins, pris ses dispositions pour faire parvenir ses dossiers à Dunford. Les deux affaires sont-elles liées ? Les faits semblent le prouver. Le problème est que Dunford s’attire autant d’ennuis que d’ennemis et que les morts commencent à pleuvoir.
Comme le dit la quatrième de couverture, bien des choses sont pourries au royaume du Yorkshire. À commencer par Dunford himself. C’est l’archétype même de l’anti-héros. Ses actes en font un personnage foncièrement antipathique qui ne s’attirera sûrement pas les grâces de la gent féminine. Véritable macho qui se fuit et fuit ses responsabilités, il devient, au fil du roman, aussi noir que les faits sur lesquels il enquête. Mais l’univers de Peace le veut ainsi. Aucun personnage n’est récupérable ; ils sont tous aussi noirs les uns que les autres. Comme les mines de charbon de la région.
Les dialogues, les phrases répétées à outrance et son univers-type font de 1974 un ouvrage fort mais haineux où l’humanité tout entière est à jeter. Ce livre est à déconseiller aux personnes dépressives. Il n’est pas sûr qu’il faille le conseiller aux autres tant il s’avère malsain comme le sont les ouvrages d’Agatha Kristof ou Les Racines du mal de Dantec. Des livres que l’on n’aime pas mais que l’on ne peut s’empêcher de lire jusqu’au bout à cause d’un voyeurisme magnétique qui pousse à voir jusqu’où ira toute cette horreur.
julien védrenne
David Peace, 1974 (traduit par Daniel Lemoine), Rivages, 2004, 396 p. — 9 €. Première édition : Rivages “thriller”, 2002, 335 p. — 21,00 €. |