Bill Moody nous convie à un voyage noir au plus profond du jazz en revisitant les derniers instants de Chet Baker…
Evan Horne est un pianiste de jazz émérite. À ses heures — qu’elles soient perdues ou pas - il joue les détectives amateurs. D’ailleurs le FBI, invoquant l’inculture de ses agents en matière de jazz, a déjà fait appel à lui. Parce que, dans le monde d’Evan Horne, le jazz aussi est soumis aux pires exactions. Tueurs en série et histoires de mœurs se mélangent. Éprouvant le besoin de souffler après une expérience douloureuse, Evan a décidé de quitter le Nouveau continent pour tenter sa chance de musicien en Europe.
Après un bref passage par Londres — le temps d’une émission radio et d’une dispute avec un vieux copain, Ace, prof d’université qui projette d’écrire un livre-enquête sur la mort de Chet Baker — Evan débarque à Amsterdam, lieu de villégiature des artistes de jazz, ville qui, aussi, vit mourir le grand Chet Baker. Ace a disparu de façon mystérieuse en abandonnant sa serviette et l’ensemble de ses recherches. Parallèlement, Evan fait la connaissance de Fletcher, un jazzman qu’il accompagne dans de nombreux sets (période pendant laquelle on joue de nombreux morceaux entrecoupés de plages de repos) d’un cabaret à l’autre. Fletcher et son fils, qui connaît la ville aussi bien que les subtilités de l’informatique, vont tenter d’aider Evan dans ses recherches. Alors que ses vieux démons ressurgissent, il est persuadé que pour retrouver Ace, il lui faut tout apprendre des derniers instants de la vie de Chet. Car alors seulement, il saura ce qui a causé la disparition de son ami. Evan Horne, détective, est de retour !
Sur les traces de Chet Baker est la quatrième enquête d’Evan Horne (après Death of a Tenor Man, Sound of the Trumpet et Bird Lives !), mais c’est la première à être traduite en français (le titre original est Looking for Chet Baker). Son héros, récurrent, joue auprès des grands ténors de jazz contemporain et on suit l’énigme, captivante, au son des mélodies de Stan Getz. Lire Bill Moody, c’est parcourir de manière ludique une encyclopédie du jazz. Tout au long de la lecture, il faut noter les différents disques cités pour mieux foncer chez son disquaire le plus proche.
Un bémol tout de même : la psychologie des personnages demeure assez sommaire. Bill Moody est bien plus à son aise avec la musique que lorsqu’il explore les complexités humaines. Cela dit, il reste Amsterdam et Chet Baker. Nul doute que François Guérif intégrera sans trop tarder les autres épisodes à son catalogue.
julien védrenne
Bill Moody, Sur les traces de Chet Baker (traduit par Jean-Paul Gratias), Rivages, 2004, 374 p. — 10,40 €. |