David Besschops fait tout afin de passer pour un schizophrène. Tout sauf le nécessaire. Car son “je” n’est pas forcément l’autre, à savoir celui “qui ne devrait exister que dans l’improférable et que je profère pourtant de ma toute intériorité qui le persécute de ma toute infériorité”. A malin donc mâlin ennemi là où le diable ne se cache plus dans les détails et où son délégué scripteur ne parle qu’au cul des vaches car un tel séant “s’avèrerait un excellent mégaphone”.
Mais le sacripant d’outre-Quièvrain (du moins un peu plus à l’Ouest puisque, comme le café, il est liégeois) n’ira pas jusqu’à une telle “extrémité” car il sait le monde désormais sourcilleux de la cause animale.
Néanmoins, l’auteur (pardon le narrateur) doit soit chercher réponse à l’irréalité de son autre qui “bruit dans la poussière”, soit se prendre par la main afin qu’en guise de soliloque il converse avec lui-même. Que pourrait-on lui reprocher ? Ce n’est pas de sa faute s’il doit travestir la réalité et faire porter une perruque à la banalité.
Dès lors, le soliloque paradoxal (puisque là ou le soi-même est deux) se poursuit à la recherche d’une vérité certes — et comme toute les vérités — bancale mais que les hommes savent si peu apprécier.
L’autre permet ainsi de démontrer que son hôte existe. Et se crée entre eux un travail aussi terrible que drôle. L’un tend ses mots à l’autre. Si bien que, dans ce dérangement, la vie n’est plus avare et obstruée. Manière de rappeler à travers Besschops que, chez chacun, il existe un autre. Il n’est pas toujours capable de créer plus de lumière que d’ombre.
Mais il suffit d’une subjectivité absolue comme celle de l’auteur pour faire de la folie une spécialisation et nous sauver d’un chaos.
Elle évite de considérer la vie comme un plagiat dont le seul objectif serait la mort que l’on se donne en faisant taire ce qui doit sortir au-delà du “K.O. de la conscience”. Peut alors éclater un orgasme — sans bonnet d’âme — dont la couleur jaune signale que la fidélité n’est qu’un piège à souris et à rats.
L’harmonisation des idées passe par cet orgueil de la modestie. Au un, elle préfère le deux.
jean-paul gavard-perret
David Besschops, Avec un orgasme sur la tête en guise de bonnet d’âne, Editions Boumboumtralala, Liège, 2019.