Dashiell Hammett, Sam Spade et autres histoires de détectives

Voici onze nou­velles de Dashiell Ham­mett — mais, en dépit du titre, trois seule­ment ont pour héros Sam Spade.

Sam Spade et autres his­toires de détec­tives est un recueil de onze nou­velles de Dashiell Ham­mett réunies par Jean-Claude Zyl­ber­stein et publiées dans une nou­velle col­lec­tion des édi­tions de La Décou­verte, “Culte fic­tions”.
Mal­heu­reu­se­ment, seules trois d’entre elles ont pour héros le fameux Sam Spade. On peut donc regret­ter ce titre un peu aguicheur.

Sam Spade et son core­li­gion­naire, le détec­tive de la Conti­nen­tal Agency, est l’archétype même du dur à cuire, le per­son­nage qui a donné son nom au genre, le Hard Boi­led. Celui qui ren­contre, en même temps que des coups sur la tête, des femmes sou­vent fatales dans cha­cune de ses enquêtes. Celui qui est sou­vent mené en bateau et qui, au final, dirige la barque.

Dans ces nou­velles, on n’échappe pas à la règle. Mais on est agréa­ble­ment sur­pris par cer­tains récits aty­piques chez Dash’ Ham­mett, comme “Le juge rit le der­nier”. On y voit deux gangsters-racketteurs user de leur faciès de brutes pour extor­quer, sans armes, de l’argent aux hon­nêtes petits com­mer­çants puis ten­ter de s’en sor­tir, lors d’un pro­cès, en invo­quant le délit de men­di­cité.
Mes clients […] sont par­fai­te­ment dis­po­sés à plai­der cou­pables sous l’inculpation de men­di­cité. […] Ils avaient besoin de fonds, sont entrés dans trois éta­blis­se­ments, et ont demandé de l’argent. Ils n’avaient pas d’armes […] et alors mes clients sont pas­sibles de trente jours de pri­son pour vaga­bon­dage. Mais vol ? Non ! 
Sur ce, les juges prennent un peu de recul pour voir com­ment incul­per ces deux zigo­tos. Une solu­tion s’impose, celle de condam­ner les vic­times de vol en tant que com­plices. En effet, elles sont gérantes de leur maga­sin, et pas pro­prié­taires. Dans ce cas, elles ne peuvent pas don­ner de l’argent qui ne leur appar­tient pas. Et on peut donc incul­per les deux gang­sters pour recel d’argent volé ! Il va sans dire qu’on s’empresse de gra­cier les “victimes-complices”, eu égard à leur désir de se mon­trer charitables.

Atmo­sphère noire, humour, ori­gi­na­lité, conci­sion des faits rela­tés. Dashiell Ham­mett est un roi de la nou­velle. Son expé­rience au sein de l’agence Pin­ker­ton lui a, sans conteste pos­sible, ins­piré quan­tité de sujets divers et variés. Deux ou trois choses sont à déplo­rer quand même. Je me suis déjà attardé au début sur le côté agui­cheur du titre alors que Sam Spade n’a qu’une pré­sence limi­tée dans ce recueil. Cet ensemble de nou­velles res­semble, de plus, à un racle­ment de fond de tiroirs après l’anthologie sor­tie en 2002, par ce même Jean-Claude Zyl­ber­stein, aux édi­tions 10–18, col­lec­tion “Domaine étran­ger” et en deux volumes : His­toires de détec­tives. Antho­lo­gie autre­ment plus inté­res­sante et plus com­plète, où l’on sent à l’oeuvre un réel tra­vail édi­to­rial. Au lieu de quoi on a l’impression, fâcheuse, que ce livre-ci est bâclé, fait à la va-vite. J’en veux pour preuves les nom­breuses omis­sions de mots ou les inver­sions de carac­tères qui émaillent le texte. Ne demeure que le talent, véri­ta­ble­ment génial, de Dashiell Hammett.

julien védrenne

   
 

Dashiell Ham­mett, Sam Spade et autres his­toires de détec­tives (tra­duit par Marie-christine Hal­pern), La Décou­verte “Culte fic­tions”, 2004, 263 p. — 13,50 €.

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Filed under Non classé, Pôle noir / Thriller

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